“Si l'argent sale pénètre le monde de la politique, il pollue la vie politique et peut entraîner le pays vers des options erronées qui nuisent à la politique sociale et solidaire du pays.” C'est Abdelaziz Belkhadem qui le disait hier. Le chef du FLN, plusieurs fois ministre, chef de gouvernement et président de l'APN, présente l'argent sale comme un péril (“s'il pénètre le monde de la politique…”), et non comme partie prenante et prégnante de cette “vie politique”. Les secrétaires des mouhafadhate auxquels le chef du FLN s'adressait n'ont pas souri parce qu'il y a longtemps qu'on a perdu le sens de l'humour dans les réunions politiques nationales, mais ce n'est sûrement pas l'envie qui leur manquait. À entendre un cacique de la longévité de Belkhadem faire semblant de découvrir la menace de la dérive mafieuse sur la pratique politique dans le pays, ces illustres délégués qui connaissent la maison devaient se demander s'ils ne se sont pas trompés de système. Celui qu'ils pratiquent n'a jamais connu de répit moral. Ce que Belkhadem appelle “la vie politique” n'a jamais été qu'une perpétuelle lutte de clans, de tribus et de coterie autour d'une rente qui justifie tous les engagements, tous les crimes politiques, tous les complots, tous les “redressements”, tous les “coups d'Etat scientifiques”, toutes les fraudes électorales qui jalonnent l'histoire de l'Algérie indépendante. Aujourd'hui plus que jamais, tout autour de la scène sur laquelle Belkhadem évolue et qui, selon lui, demande à être préservée de l'argent sale, il n'y a que corruption, détournements et passe-droits. À l'occasion, les acteurs politiques ne s'en cachent même pas. Y compris en période électorale où les candidats du pouvoir jettent de l'argent par la fenêtre. On paie le colleur d'affiches et le porteur de bidons de colle ; on lance des cortèges de voitures dans lesquelles des manifestants rémunérés hurlent des slogans préfabriqués. L'argent sale “pénètre” si allègrement dans le monde politique qu'on le voit en ressortir avec la sonorité d'une démonstration de force. Les campagnes électorales, quand il s'agit de candidats du pouvoir surtout, sont devenues dépensières jusqu'à l'écœurement. Des patrons se réunissent pour décider de leur contribution… financière à l'issue de ce qui aurait dû être un débat politique. Et toutes sortes de sponsors font publicité de leurs largesses envers les futurs décideurs, un peu comme s'ils prenaient les institutions à témoin de la légitimité du retour d'ascenseur à venir. Comme disait une publicité à propos des chaussettes, l'alliance entre la politique et l'argent “ne se cache plus”. Ce n'est donc plus le moment de poser la question de ce concubinage détonant. Encore moins maintenant qu'on sait que la Sonatrach, mamelle nourricière du système, subissait aussi des tétées clandestines ! C'est la politique qui décide où va l'argent ; et l'argent le lui rend bien. Le pays n'est que le terrain vague où se récoltent les fruits de cette sordide alliance. Sinon, comment expliquer que la mise en œuvre d'une loi conçue pour interdire l'extraction du sable d'oueds soit régulièrement reportée pendant qu'on continue à polluer le milieu alluvial ? Qu'un système, dont l'accaparement privé de rente constitue la finalité, se plaigne d'être “arrosé” par l'argent sale, c'est l'hôpital qui se f… de la charité. M. H. [email protected]