Lors d'une rencontre avec le public, samedi à Paris, Fatiha et Rahmouna ne se sont pas privées de mettre à nu l'attitude du ministre de la Solidarité nationale. Trop heureuses d'être revenues de l'enfer, les suppliciées de Hassi-Messaoud n'avaient pas hésité à étouffer leur colère dans l'espoir d'une prise en charge sociale. Lorsque le président de la République avait pris connaissance de leur calvaire, il avait envoyé une aide pécuniaire puisée dans sa propre proche, reconnaissent avec beaucoup de considération et de gratitude Rahmouna Salah et Fatiha Maâmoura dont la comédienne Nadia Kaci a recueilli les témoignages pour en faire un livre. Convoquant les caméras de l'ENTV, Djamal Ould-Abbès, ministre de la Solidarité nationale, avait rendu visite aux survivantes pour porter l'offrande présidentielle. En ministre, il avait le pouvoir d'offrir immédiatement une prise en charge à ces femmes jetées dans le dénuement. Au lieu de cela, il s'est répandu en promesses. Assorties d'une condition : le silence. Neuf ans après la sanglante attaque, les promesses ministérielles se sont envolées. Pas de boulot, pas de logement. Juste quelques kilos de lentilles et de pâtes alimentaires. Une autre violence à l'encontre de femmes qu'on ne peut pas soupçonner d'ingratitude ou de militantisme zélé. Victimes pourtant d'un déni total, elles ont rendu hommage à quelques policiers qui se sont individuellement et spontanément portés à leur secours et aux juges qui ont prononcé des condamnations. Non, on ne peut pas les soupçonner de faire de la politique. Les promesses non tenues d'Ould-Abbès ne peuvent plus être avalées. Depuis quelque temps, elles se font renvoyer sans ménagement du ministère quand elles viennent aux nouvelles. “Il est plus facile d'être reçue à la Maison-Blanche que par un maire”, ironise la volubile Rahmouna. Désormais, le monde connaît toute la classe du ministre. Lors d'une rencontre avec le public, samedi à Paris, Fatiha et Rahmouna ne se sont pas privées de mettre à nu ce comportement. La voix entrecoupée de sanglots, les deux femmes ont raconté cette nuit de violence paroxystique du 13 juillet 2001. Face à un auditoire presqu'exclusivement féminin, le propos est resté pudique pour raconter l'extraction de l'utérus, la main enfoncée dans l'intimité pour ensuite étaler le sang sur le visage. C'est aussi par pudeur qu'elles n'ont pas exposé les photos témoignant de cette agression. Elles ont été prises pour appuyer les plaintes. Trop trash pour être étalées sous les yeux du public complètement retourné par le récit des deux femmes. Fatiha et Rahmouna n'ont pas témoigné pour elles-mêmes mais pour toutes les femmes. Pour qu'il n'y ait plus un autre Hassi-Messaoud. Le feu couve toujours sous les cendres de prêches intolérants. Aujourd'hui, Rahmouna et ses filles vivent grâce au fils qui travaille comme porteur dans un marché de fruits et légumes. Un salaire maigre mais surtout aléatoire. Fatiha est mieux. Son mari cumule les contrats précaires comme agent dé sécurité.