La SNVI est une entreprise publique économique (Epe) traînant un gros paquet de dettes depuis des lustres, mais qui a la particularité de ne jamais avoir eu l'opportunité d'une restructuration comme les autres Epe. Au moins pour un nouveau départ. De toutes les Epe, c'est la seule dans ce cas. Un paradoxe : d'un côté étranglée par ses dettes et étoffée dans sa gestion, alors que le marché fait confiance à ses produits et lui est fidèle. Alors tout se passe hors entreprise bien que la Snvi dispose depuis quelques années d'un très confortable carnet de commandes, trois années de production, et que ses produits ont même quelques bonnes petites chances pour des percées à l'exportation. S'il n'y avait que le marché, la SNVI n'a pas eu beaucoup à souffrir d'un carnet de commandes dégarni : elle ne traîne que de contentieux anciens. Avec ses 7 000 salariés, un taux d'encadrement de 7%, et un chiffre d'affaires, bon an mal an, autour de 17 milliards de dinars, l'entreprise souffre, entre autres, du manque de mobilité des salaires si nécessaire à cette filière, très capitalistique, où les salaires tiennent peu de place, soit 3,3 milliards de DA, par rapport aux investissements très lourds, et la qualification n'est vraiment pas rémunérée comme il se doit. Avec des écarts de salaire allant de 1 à 3, soit 16 000 dinars pour un agent de maîtrise et 45 000 dinars pour un directeur d'unité, l'éventail des qualifications devrait être assez large théoriquement, mais l'écart des salaires entre le plus haut et le plus bas ne dépasse pas 1 à 3. Avec des rémunérations aussi basses, le système de stimulants (primes et indemnités diverses) ne parvient pas à creuser l'écart, si nécessaire à fouetter l'activité et la qualification, le problème se situant d'abord à la base avec d'aussi faibles salaires, soit un salaire moyen de 18 000 DA. La grille est de loin inférieure à celle des emplois publics qui est tout de même de 1 à 7,3 pour les salaires de base, de plus bas au plus haut, avec un écart probablement supérieur en incluant primes et indemnités. Rien d'étonnant donc à ce que tous les indicateurs économiques nationaux progressent depuis sauf les revenus salariaux, et on ne voit jusqu'ici aucune perspective d'évolution sans réinsertion de la question au sein des entreprises même, l'essentiel du nœud de réseaux décisionnels de gestion devant y résider forcément. Après la dernière tripartite, les fédérations syndicales se sont mises au travail pour négocier les conventions collectives avec les entreprises publiques et leur tutelle, les sociétés de gestion et de participation (SGP) : pour ce qui est de la métallurgie, les revendications tablent sur une hausse générale de 35% des salaires, mais la SGP responsable ne l'entend pas de cette oreille, classant les entreprises du secteur en trois catégories : celles bénéficiaires, celles stables et celles dites déstructurées, et n'envisageant qu'une hausse minime pour les seules entreprises bénéficiaires. Un dialogue de sourds apparemment, les syndicats faisant prévaloir la baisse du pouvoir d'achat, et les SGP se limitant aux seuls profits dégagés malgré les carcans gouvernementaux, responsables, entre autres, du désinvestissement industriel généralisé compromettant durablement toute compétitivité ou son amélioration. Affaire à suivre, car les représentants syndicaux se sont retirés de la négociation après quatre séances infructueuses.