Quoi que puisse faire Sarkozy, le bilan des élections régionales lui sera imputé au moins en partie. Cela ne peut que l'irriter et surtout l'inquiéter, l'échéance présidentielle n'étant plus qu'à 25 mois. Il y a quelques mois, alors même qu'il faisait lancer le détestable débat sur l'identité nationale par un de ses ministres particulièrement zélé, soucieux sans doute de donner des gages de son ralliement idéologique, le président Sarkozy ne cachait pas son intention de donner une dimension nationale à la campagne électorale des régionales en s'y investissant personnellement et en y incluant des thèmes qui dépassent les prérogatives et les préoccupations des institutions locales. Le moins qui puisse en être dit est que l'initiative n'est pas des plus heureuses, puisque tous les sondages prévoient une cinglante défaite de l'UMP et une victoire sans précédent de la gauche, qui pourrait même récupérer jusqu'aux quelques bastions réputés imprenables de la droite. Concomitamment, sa cote de popularité, déjà au plus bas, a continué sa chute pour atteindre les abysses. Le fait est que dans cette affaire, le président “de tous les Français” a enfreint une loi non écrite, scrupuleusement respectée par tous ses prédécesseurs à l'Elysée depuis le général de Gaulle. Il a bien essayé de corriger le tir en annonçant qu'il ferait marche arrière au milieu du gué, n'hésitant même pas à renier son attitude pourtant si proche, se rappelant au bout du compte que sa fonction présidentielle le mettait au-dessus des joutes électorales et au service de tous ses compatriotes. “Ce n'est pas le rôle d'un chef d'Etat”, disait-il le 26 février via les écrans de TF1. Mais sitôt dit, sitôt contredit. La ministre Pécresse, tête de liste en région Île-de-France, dont la campagne tourne à la catastrophe, a été convoquée mardi à l'Elysée en même temps que toutes les têtes de liste des départements de la région. Objectif : leur demander des explications, notamment sur le scandale Ali Soumaré, ce candidat du PS qui a été accusé à tort par des élus UMP du Val-d'Oise d'être un repris de justice, et tenter de recadrer la campagne électorale pour sauver ce qui peut l'être. Quoi que puisse faire Sarkozy, le bilan des élections régionales lui sera imputé au moins en partie. Cela ne peut que l'irriter et surtout l'inquiéter, l'échéance présidentielle n'étant plus qu'à 25 mois. Cela d'autant plus que son bilan général à la tête de l'Elysée n'est pas reluisant, ce qui ne peut être éternellement et entièrement justifié par la crise mondiale. Le chômage est en hausse permanente, l'insécurité n'est pas jugulée, les déficits publics atteignent des seuils prohibitifs, au point qu'un scénario à la grecque est de plus en plus évoqué, le débat sur l'identité nationale aura été aussi dangereux que contreproductif et les réformes annoncées de la justice et des retraites sont très impopulaires. À l'UMP, pour se donner bonne contenance, on insiste sur le fait que les élections locales ne permettent pas d'extrapolation sur l'élection présidentielle. On affirme même que le peuple français, qui a apprécié les périodes de cohabitation, désormais peu probables depuis l'instauration du quinquennat présidentiel à la place du septennat, aurait tout simplement décidé d'octroyer les régions à la gauche et de laisser le Parlement et l'Exécutif à la droite, créant ainsi une illusion ou un simulacre de cohabitation. Lorsqu'on sait qu'en face, le Parti socialiste retrouve progressivement ses couleurs et une certaine stabilité, les raisons de s'inquiéter sont réelle pour la planète Sarkozy. C'est peut-être même ce qui explique une des dernières sorties médiatiques de Xavier Bertrand, secrétaire général de l'UMP, dans laquelle il propose rien moins que de tenter une réconciliation entre Nicolas Sarkozy et son meilleur ennemi, Philippe de Villepin. Lorsqu'on sait que ce dernier est décidé à briguer l'Elysée en 2012 et qu'il peut au minimum affaiblir le président sortant en puisant dans son électorat, on comprend mieux la motivation de la démarche, qui n'a rien d'angélique et qui est sans doute vouée à l'échec. Alors, improbable l'échec de Sarkozy en 2012 ? Pas si sûr…