L'argument commercial invoqué par le gouvernement ne repose sur aucun fondement. S'il y a un secteur sous haute surveillance, c'est bien celui de l'information. Car il est l'interface, le porte-voix de toutes ces catégories atteintes dans leurs droits et libertés. En effet, aujourd'hui encore, les quotidiens Liberté, Le Matin, El Khabar, Le Soir d'Algérie, L'Expression et Er-Raï sont menacés de non-parution à partir de lundi prochain. Il est demandé à ces titres d'acquitter leurs dettes, faute de quoi, ils seront suspendus d'impression. À chaque moment important de la vie politique, comme c'est le cas avec la prochaine élection présidentielle, les velléités de museler la presse resurgissent. Cette grossière tentative d'intimidation relève plus d'un acte politique que commercial. Les éditeurs ont constamment fait preuve de disponibilité pour honorer l'ensemble des créances et des échéanciers de payement sont établis d'un commun accord avec les sociétés nationales d'impression. Cette nouvelle menace sur la presse indépendante est étrangement, cette fois aussi, orchestrée sous le gouvernement Ouyahia. Novembre 1998, les quatre sociétés, la SIA, la SIO, la SIE et Simpral, ont invité les éditeurs de la presse privée d'acquitter leurs dettes. À l'époque, la correspondance de ces sociétés étatiques est tombée au moment même où un long communiqué du porte-parole du gouvernement Ouyahia menaçait, dans une déclaration, de “ne plus rester passif devant des articles parus dans certains journaux”. Les quotidiens El Watan, Le Matin, Le Soir et La Tribune ont été suspendus d'impression. El Watan, à l'époque, même après payement de ses dettes, le 9 novembre (3 818 000 DA), est resté sous le coup de la suspension, ce qui avait confirmé l'acte outrancier d'abus de pouvoir du gouvernement. Il est à rappeler aussi que les amendements du code pénal durcissant les sanctions contre la presse ont été élaborés et défendus par Ouyahia et ce, malgré la grande mobilisation de la corporation et de toute la société civile. Même des manifestations et des marches ont été réprimées. Aujourd'hui et encore sous le gouvernement Ouyahia et sous le couvert commercial, la presse est menacée de non-parution. Cette menace vise des quotidiens qui ont fait éclater des scandales ou révélé des affaires de corruption, de passe-droits et d'abus de pouvoir. M. B.