La menace de suspension qui pèse sur six titres de la presse n'a pas laissé indifférente la rue constantinoise. La ville, qui a été un vestibule de plusieurs plumes reconnues, partage, dans sa majorité, un sentiment de solidarité et de compassion avec les titres éligibles à une non-parution dès demain. De l'avis général, il est évident que le contentieux financier n'est autre qu'un prétexte fallacieux pour museler la presse. C'est ce qui a été exprimé par Mme Fatiha Z., enseignante au département d'électronique de l'université de Mostaganem. En visite chez sa famille à Constantine, cette universitaire s'indigne devant ce genre de procédé utilisé pour, uniquement, faire taire la presse. “Le rôle de la presse est prépondérant dans l'éclairage de l'opinion publique. C'est grâce à ses colonnes que le simple citoyen a eu vent de la dilapidation des deniers de l'Etat”, dira-t-elle. Sara Benhacène, vétérinaire de son état, abondera dans le même sens : “Le pouvoir a brandi, encore une fois, comme en 1998, une excuse pas trop convaincante pour verrouiller le champ médiatique, particulièrement cette presse qui n'obtempère qu'à son éthique, celle du droit d'informer les lecteurs, d'autant que les scandales rapportés par ces journaux, ces derniers jours, concernent les biens de tous les Algériens.” D'aucuns conviennent de la nécessité de résister devant les décisions émanant, en apparence, de la direction de l'impression, mais édictées par la sphère dirigeante, éclaboussée par plusieurs affaires et qui joue la carte de la suspension, pour faire plier ce qu'on qualifie de 4e pouvoir. Un acquis qui mérite d'être défendu, selon toutes les personnes abordées, d'autant qu'il est devenu depuis une décade synonyme de pluralisme et de diversité culturelle, idéologique et politique. “De la sorte, chacun peut se retrouver dans un titre ou dans un autre”, diront Nadir et Boubekeur, deux jeunes employés des collectivités locales, attablés à la terrasse du café Ennadjma, dans la rue Larbi-Ben-M'hidi. Et à Nacéra, interne au CHU de Constantine, d'ajouter qu'il faudra empêcher l'éventuelle suspension, en payant les créances de l'imprimerie. “Pour ne laisser aucun prétexte au pouvoir”, dira-t-elle. D'autres diront qu'il faudra alerter l'opinion internationale afin qu'elle exerce une pression sur le pouvoir algérien qui s'attaque sournoisement à la notion de la liberté d'expression. “Même si la presse semble exagérer parfois en dévoilant des affaires dont la véracité n'est toujours pas établie, du moins pour le lecteur, sa suspension relèverait de l'arbitraire et du totalitarisme”, conclura Hocine Y., cadre à l'Enmtp. N. D.