Oussalem a remarqué le recul de l'usage de la langue amazighe dans la société. Or, celle-ci connaît justement un problème d'usage. Mohand-Ouamar Oussalem, enseignant à l'université Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou, a animé hier une conférence au siège du FFS au centre-ville de Tizi Ouzou à l'occasion du 30e anniversaire du Printemps berbère. L'occasion pour le conférencier, ancien militant de la cause amazighe, de revenir sur le parcours du combat identitaire. Pour lui, tamazight a certes engrangé des acquis, mais il lui reste encore du chemin ; le combat est long. La langue amazighe est encore marginalisée au niveau institutionnel, estime d'emblée M. Oussalem. À titre d'exemple, la tranche horaire réservée à l'enseignement de tamazight dans le système éducatif reste insignifiante. “Avec trois heures par semaine, elle est considérée comme une langue étrangère”, regrette l'intervenant. Tout en saluant l'introduction de tamazight à l'école, dans les médias et même le cinéma, avec certes beaucoup d'insuffisances, le conférencier ne s'est pas empêché de dire ses vérités sur l'évolution de la langue de Mammeri dans la société. Il n'hésitera pas à souligner ce que les sociolinguistes appellent “l'auto-minoration”. Oussalem a remarqué le recul de l'usage de la langue amazighe dans la société. Or, tamazight connaît justement un problème d'usage. Partant du postulat que la langue est un bien collectif, il considérera que tamazight a besoin de protection ; et la meilleure protection reste sans doute son usage au quotidien par ses locuteurs. Sur ce plan, même l'apprentissage de la langue a reculé, fera remarquer l'orateur. Celui-ci craint que tamazight disparaisse si, en plus de sa marginalisation dans les institutions de l'Etat, elle n'est pas prise en charge dans la société, en ce sens que les locuteurs ont tendance à privilégier l'usage du français et de l'arabe. Il citera l'exemple d'une enseignante, qui dans une conférence, a interpellé M. Oussalem sur ses réponses en tamazight à des questions posées pourtant en français, en disant qu'elle “était gênée par les mots kabyles.” De quoi désespérer, regrette le conférencier qui dira que “les langues étrangères sont ancrées dans nos têtes.” Mais alors que peut-on faire ? Oussalem suggère des pistes de sortir de crise. D'abord, la langue est avant tout un problème de société. C'est son usage permanent qui fera qu'une langue, dans ce cas tamazight, évitera le purgatoire de la disparition. Mais un préalable à tout cela : l'union dans la revendication même si les divergences peuvent bien exister entre les acteurs de la cause amazighe. Selon l'orateur, plus de la moitié des 6 000 langues dans le monde risque de disparaître d'ici 150 ans.