Directrice de la rédaction, correspondante pour la presse étrangère, militante engagée et féministe assumée, Baya Gacemi est l'une des plus illustres figures de la presse algérienne durant ces 20 dernières années. Elle est décédée dans la nuit de samedi à dimanche à l'hôpital Gustave-Rousset de Villejuif, près de Paris. À 59 ans, elle a été vaincue par la maladie. Elle avait pourtant la peau dure. Coriace. Dans les années 1990, lorsque de très nombreux confrères avaient légitimement fait le choix de l'exil pour fuir les couteaux et les balles des groupes terroristes qui avaient juré d'éradiquer ces impertinents combattants de la plume, Baya avait décidé de rester à Alger. D'écrire l'histoire au quotidien. Dans les colonnes de La Nation, puis de La Tribune et de L'Epoque, le dernier magazine qu'elle a fondé mais qui n'a pas eu la vie longue parce que trop politiquement incorrect pour attirer les annonceurs. De cette période, Baya a témoigné dans de nombreuses publications étrangères, notamment l'hebdomadaire français L'Express dont elle était la correspondante à Alger jusqu'à une date récente. Bien des confrères étrangers se souviendront de sa précieuse aide puisqu'elle leur avait permis de connaître l'Algérie en les accompagnant dans les zones les moins recommandables. Des années de terrorisme, elle aura laissé un livre qui jetait une lumière crue sur une catégorie de femmes particulière : les épouses de terroristes qui ont vécu les engagements de leurs conjoints sans possibilité de les désavouer. Moi, Nadia femme de terroriste a été traduit en plusieurs langues. Diplômée de sociologie, Baya était connue pour ses écrits. Mais aussi pour ses engagements. C'est une femme qui assumait publiquement ses options politiques. En 1999, elle avait intégré l'équipe de campagne de Mouloud Hamrouche. Elle était également proche de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme. Il y a un peu plus d'un an, elle s'est encore illustrée en initiant une pétition contre un troisième mandat de Abdelaziz Bouteflika. Baya est partie sans prévenir à cause d'une maladie qui l'a surprise. Elle sera inhumée dans sa ville natale d'Annaba où elle rêvait de prendre sa retraite.