Résumé : Mohamed propose à son ami un travail. Il veut qu'il s'initie au transport des marchandises et pour cela il veut louer ou acheter une carriole. Mais Ali lui avoue qu'il ne sait ni conduire ni monter un cheval. 32eme partie Il se met à contempler le ciel un moment par la petite fenêtre de la chambre. - Je crois que je t'ai trop retenu pour aujourd'hui, Ali. Il est temps pour toi de rentrer à la maison, ta mère doit s'inquiéter. - Elle a l'habitude de me voir rentrer tard. - Au fait où habite-tu ? - Non loin d'ici. - Dans une maison arabe avec chambrettes et cour ? - Deux chambres et une courette qui menacent ruine. Nous avons hérité du seul bien de nos grands-parents, un toit. - C'est toujours mieux que d'être dans la rue. - Mais les murs sont à moitié pourris et la courette est toute tordue. - Cela ne fait rien. Quand tu travailleras tu arrangeras tout ça, Ali. Je t'y aiderai. - Merci, mon ami. Heu les nuits son fraîches, pourquoi n'allumes-tu pas la cheminée ? - La cheminée ? - Oui. L'alcôve briquée dans le murs d'en face est une cheminée. Tu vas mettre du charbon ou du bois mouillé d'alcool et allumer un feu. Les braises tiennent chauds. Mais entrouvre tout de même la fenêtre pour évacuer les gaz. Mohamed s'approche un peu plus du mur et contemple un moment les briques taillées en arcade. Il n'avait jamais encore vu de cheminée, mais il fut tout de suite charmé par le décor. - Où peut-on obtenir du charbon et du bois Ali ? - En ville il y a des charbonniers, mais pour ce soir, je vais m'en charger. Attends-moi un moment. Ali sort et revient au bout d'un quart d'heure avec une provision de charbon et une bouteille d'alcool à brûler. Il entasse le charbon dans la cheminée et l'arrose d'alcool, avant de faire craquer une allumette. Aussitôt, le charbon prend feu et Ali se met à souffler jusqu'à ce que tout le charbon entassé s'enflamme. Il se met à le ventiler un moment avec son écharpe et ne s'arrête que lorsque les braises reflètent leur éclat dans toute la pièce. Mohamed sentait la chaleur envahir les lieux, il se débarrasse de son burnous. - C'est magnifique. Cela remplace amplement l'âtre de chez nous. - C'est une manière de se réchauffer en hiver. On peut même faire sa cuisine dessus. - Merci Ali. Je vais tenter désormais d'apprendre tous les secrets de la ville. - C'est qu'il y en a, dit Ali d'un air hautain et connaisseur. Mohamed rit. - C'est pour cela que tu ne sais même pas monter à cheval. Ali se met à rire. - Oui, parce qu'il y a bien d'autres chats à fouetter. Le jeune garçon s'en va et Mohamed demeure seul. Il prend son fusil et le regarde un moment avant de le mettre sous sa couverture. Il n'aura pas besoin de son arme dans cette grande ville. Ici les gens sont moins coriaces et puis d'ailleurs il risque de se faire arrêter pour port d'arme illicite, tel que le lui avait expliqué ce chenapan d'Ali tout à l'heure. Il se met à penser à sa chance d'être ce soir enfin chez lui. Un chez-soi dont il n'en revenait pas encore et dont il n'avait jamais rêvé. Certes, il avait pensé à louer une chambre quelque part dans un hôtel de quartier, ou chez un citadin, mais penser que la chance allait lui sourire et mettre dès son arrivée en ville toute cette maison à sa disposition, il ne l'aurait jamais cru. Il s'étendit sur sa couverture et se couvrit de son burnous. À la lumière des braises dans la cheminée, il se met à contempler la chambre et son sol dont le carrelage brillait. Il se sentit heureux et en paix avec lui-même. Alors il remercie Dieu encore une fois et une larme roula sur sa joue quand il repense pour la énième fois de la journée à sa défunte mère. Au petit matin, Ali vint le réveiller. Mohamed avait bien dormi et n'avait pas du tout souffert du froid glacial de la nuit. Il se lève, et s'étire, avant de remettre ses habits et son burnous. - Où allons-nous aujourd'hui ? demande Ali d'un air candide comme si Mohamed connaissait la ville mieux que lui. Mohamed sourit. - Tu as déjà oublié ? N'avons-nous pas convenu d'aller ensemble acheter ou louer une carriole pour que tu puisses travailler. - Ah oui ! Mais je pensais qu'il fallait d'abord apprendre à monter à cheval et… - Non. Je vais tâcher de trouver quelque chose d'abordable en premier lieu et le reste suivra. - Eh bien, pour dénicher une carriole à bon prix, je connais des charpentiers qui revendent volontiers des charrettes endommagées mais encore valables. Tu pourras trouver une bonne occasion et puis nous procéderons aux réparations qu'il faut sans avoir à trop dépenser. - Hum… Tu parles en bon connaisseur commercial Ali. Allons d'abord prendre un café chaud, puis nous redescendrons en ville pour dénicher ces fameux charpentiers. Y. H. (À suivre)