C'est encore aux Palestiniens de faire des concessions. Le président de l'Autorité palestinienne s'est dit prêt, en début de semaine, à procéder à un échange de terres avec Israël ! Une annonce que la partie israélienne n'a pas retenue apparemment puisque Mahmoud Abbas a tout de suite ajouté qu'il est loin de trouver avec Netanyahu un terrain de convergence sur la superficie et la localisation de ces zones. Autant dire sur le principe même de l'échange de la paix contre la terre proposé par la Ligue arabe voilà un bon bout de temps à l'initiative des Saoudiens. Mahmoud Abbas a fait ces déclarations à l'issue de deux sessions de pourparlers indirects avec Israël sous médiation américaine. Ces négociations ont repris début mai, après 17 mois de gel des discussions, l'émissaire américain George Mitchell faisant la navette entre Abbas et le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. C'est la première fois depuis leur ouverture qu'un participant fournit des précisions sur leur teneur. Selon le président palestinien, la première session de discussions a donc porté sur les arrangements en matière de sécurité et sur les frontières entre Israël et un futur Etat palestinien. La partie palestinienne souhaite échanger des territoires “de qualité et valeur égales”, a déclaré Mahmoud Abbas, s'adressant certainement au président américain Obama qui, lui, joue sa crédibilité dans ces négociations. Or, Israël veut annexer d'importantes colonies de peuplement juives construites dans des zones souhaitées par les Palestiniens, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. En 2008, l'Autorité palestinienne avait offert de céder 1,9% de la Cisjordanie au Premier ministre d'alors Ehud Olmert, qui voulait lui un échange portant sur 6,5% du territoire. Netanyahu, quant à lui, n'a même pas laissé entendre qu'il agréait l'idée, la simple idée, d'un échange de terres, et encore moins sur la superficie de la Cisjordanie qu'il veut garder. Et pourtant, Obama en personne l'a admis, un tel échange serait crucial dans le cadre d'un accord définitif israélo-palestinien et, par extension, à une normalisation entre Israël et ses voisins arabes. Entièrement désarmé, le président palestinien a appelé ses concitoyens au boycottage des produits fabriqués dans les colonies juives, soulignant que cet appel ne concernait pas les produits fabriqués dans le reste du territoire israélien. “Nous ne boycottons pas Israël, a-t-il souligné, car nous avons des relations avec cet Etat et nous importons des produits d'Israël.” La décision a été prise de fait le mois dernier avec décret interdisant la vente et le négoce des produits fabriqués dans les colonies juives en Cisjordanie. Toute personne reconnue coupable de se livrer au négoce de tels produits risque de deux à cinq ans de prison et 16 000 euros d'amende ! Près d'un demi-million d'Israéliens vivent dans plus de 120 colonies établies en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est annexée. Les pourparlers indirects, sous forme de navettes de Mitchell, l'envoyé spécial de la Maison-Blanche, entre Jérusalem, Ramallah et Washington, ont certes abouti à des réunions triangulaires, mais peu d'analystes accordent la moindre chance à ces discussions. Israël se refuse catégoriquement à stopper la colonisation à Jérusalem-Est, dont l'annexion par Israël en 1967 n'est pas reconnue par la communauté internationale, un gel toujours exigé par les Palestiniens. Israël ne veut pas d'échanges de terres pour que le futur Etat palestinien ait la forme de confettis, sans continuité territoriale, et cela pour qu'il ne puisse pas assurer sa propre sécurité. En mars dernier, Obama avait beau frapper sur son bureau ovale, Netanyahu en a fait qu'à sa guise : il a fait avorter l'injonction de Washington en annonçant son projet de construire 1 600 nouveaux logements dans un quartier juif de Jérusalem-Est. Obama, qui n'a rien pu faire, a inventé les négociations indirectes. Tout au plus se dit-il prêt à transférer au contrôle sécuritaire palestinien de nouveaux secteurs en Cisjordanie, à la lever des barrages routiers et à élargir des prisonniers palestiniens. Une gouttes d'eau devant les concessions qu'il exige de Mahmoud Abbas à qui il propose un homeland, un Etat symbolique et surtout pas du tout viable. C'est dire que le processus d'Obama est lui aussi frappé d'un grand scepticisme. Les Israéliens n'y croient pas, c'est tout dire.