L'Algérie misait sur une croissance économique de 3,5% en 2009, mais celle-ci ne s'est élevée qu'à 2,2% (contre 2,4% en 2008), un taux insuffisant pour juguler le chômage et atténuer la pauvreté. C'est ce que relève le rapport 2010 des Perspectives économiques en Afrique (PEA), rendu public le 24 mai dernier. “Cette performance moyenne résulte de la chute des recettes d'exportations des hydrocarbures, qui se sont avérées inférieures de moitié à celles de 2008 avec la baisse des cours et de la production”, explique le rapport, estimant que “le poids du secteur des hydrocarbures dans le produit intérieur brut et dans les revenus de l'Etat a été un facteur aggravant de la crise”. Si le secteur pétrolier a enregistré une baisse à la fois de la production et des volumes exportés, le secteur agricole en revanche a été l'un des moteurs de la croissance hors hydrocarbures, grâce notamment à une production céréalière sans précédent. L'industrie, quant à elle, continue de stagner, alors que les secteurs des services, des infrastructures et de la construction, tirés par une forte demande publique, affichent de bons niveaux de croissance. Les PEA indiquent qu'en 2010, la croissance globale continuera à être fortement impulsée par les investissements publics, notamment dans les infrastructures et les services, et elle devrait remonter à près de 4% (5,5% hors hydrocarbures). “Il reste cependant impératif de diversifier davantage l'économie vers les secteurs pourvoyeurs d'emploi comme l'industrie et l'agriculture”, souligne le document. Le rapport affirme que les mesures prévues par la loi de finances complémentaire (LFC 2009) pour promouvoir et protéger une production domestique en substitution aux importations peuvent à moyen terme redonner du souffle à ces deux secteurs. lourdeurs bureaucratiques Les perspectives économiques en Afrique constatent que le climat des affaires en Algérie souffre toujours des lourdeurs bureaucratiques et des changements intempestifs touchant aux politiques publiques. Certains indicateurs se sont toutefois améliorés, comme ceux concernant les conditions d'octroi des permis de construire ou l'obligation d'achèvement des travaux de construction dans des délais définis ; l'adoption du nouveau code civil des procédures, qui réduit les délais d'instruction des dossiers de justice et a vu l'informatisation des tribunaux ; la réduction du coût des transactions immobilières et foncières et la défiscalisation des plus-values boursières. “Mais beaucoup reste à faire pour conformer le climat des affaires aux normes communément admises, comme le relève l'édition 2010 du rapport de la Banque mondiale Doing Business, qui fait reculer l'Algérie de deux places en un an pour la positionner au 136e rang”, lit-on dans le document. En termes de corruption, aussi, des efforts restent à faire. “Dans son dernier rapport, Transparency International a calculé pour l'Algérie un "indice de perception de la corruption" (IPC) de 2.8, la classant à la 111e place mondiale et à la 10e parmi les 18 pays du Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord)”, rappelle le document. Le document estime que le sous-encadrement de l'administration fiscale, surtout au niveau local, et l'évasion fiscale engendrée par la quasi-absence de facturation des transactions commerciales, notamment informelles, font échapper à l'impôt une grande part de ressources. “L'absence d'encadrement des marchés de gros et la liberté laissée aux opérateurs, notamment agricoles, de commercialiser des volumes importants de biens hors de ces marchés, ajoute à la faible collecte de ressources fiscales”, lit-on dans le rapport. Le secteur informel, qui représenterait plus de 35% de l'activité économique, ainsi que les indépendants, soumis pour la plupart à un impôt forfaitaire, sont à l'origine d'un important déficit de recettes fiscales. Par ailleurs, face aux tentatives de l'administration de les formaliser, ces deux catégories rechignent à rendre transparente leur gestion, prétextant tour à tour le niveau élevé des impôts, les tracasseries des agents du fisc ou le coût élevé de la formalisation. Le rapport rappelle que l'étude “Paying Taxes” 2010, réalisée par le cabinet PricewaterhouseCoopers en coopération avec la Banque mondiale, classe l'Algérie au 168e rang sur 183 pays ; elle estime que la faible pression fiscale dans le pays ne génère pas forcément plus d'activité économique lorsque le système fiscal global est désorganisé. “Pourtant, des efforts, tels que l'institution d'un impôt forfaitaire unique, la bonification de taux d'intérêt, les exonérations ou la prise en charge par l'Etat d'une partie des charges patronales ont permis de créer plus de PME et de faire” sortir du bois “nombre d'entreprises informelles”, relève le document. Par ailleurs, les PEA notent qu'en raison du volume des importations, “le secteur extérieur est soumis à de fréquentes tentatives de corruption, de fraude fiscale et de fuite de capitaux, portant notamment sur les quantités importées et les prix de transfert”. L'Algérie a fait des progrès considérables pour améliorer ses indicateurs sociaux Concernant le développement humain, le document note que l'Algérie a fait des progrès considérables pour améliorer ses indicateurs sociaux et elle est en bonne voie pour atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). D'une manière générale, les performances d'accès à l'éducation de base sont bonnes. En termes de pauvreté, les PEA rappellent que le dernier classement du Pnud place le pays au 71e rang sur 135 pays, avec un indice de la pauvreté humaine (IPH-1) de 17,5%. Cependant, le rapport relève que des efforts sont nécessaires pour réduire à moins de 6,4% la proportion des personnes décédant avant l'âge de 40 ans, réduire l'analphabétisme des 15 ans et plus (24,6%), garantir l'accès à une eau améliorée à 95% de la population et ramener à moins de 4% le nombre d'enfants de moins de cinq ans souffrant d'une insuffisance pondérale.