L'attaque de “la flottille de la liberté” par l'armée israélienne, loin de ses côtes, dans les eaux internationales, si elle choque par son caractère meurtrier, n'étonne pas dans son principe. Elle illustre la doctrine permanente de l'Etat hébreu explicitement homologuée par les puissances qui parlent au nom de la communauté internationale : primo, tout ce qui concourt à la sécurité d'Israël est légitime ; secundo, Israël seul définit les actions qui concourent à sa sécurité. La “communauté internationale” n'ayant que le loisir de s'émouvoir des effets de cette logique, mais jamais de remettre en cause ce droit à une défense multiforme, souverainement définie, soutenue et affranchie des contraintes du droit international. Ceux qui crient à l'illégalité et à la sauvagerie de l'intervention feignent d'ignorer qu'il n'y a pas si longtemps, Israël a utilisé des passeports de ressortissants européens pour aller assassiner un Palestinien sur le territoire d'un Etat souverain. Si l'attitude de consentement, parfois perturbée par la médiatisation occasionnelle d'images de massacres, de la “communauté internationale” est établie, que font ceux qui prétendent faire cause de la question palestinienne ? La Ligue arabe a attendu que le Conseil de sécurité, la Commission des droits de l'Homme de l'ONU et les ambassadeurs de l'Europe se soient réunis et exprimés pour enfin tenir séance, vingt-quatre heures plus tard et trente-six heures après le massacre. Si Israël et ses puissants alliés savent ce qu'ils veulent – laminer l'aspiration nationale palestinienne jusqu'au fait accompli –, les Palestiniens n'ont pas de projet unitaire et leurs alliés ne sont pas prêts à payer le prix de leur cause. Celle-ci n'a plus que l'existence discursive qu'elle doit à sa rentabilité politicienne locale. Chaque régime arabo-musulman a le souci contradictoire de satisfaire son opinion sans se mettre à dos une “communauté internationale” chatouilleuse sur les principes d'inviolabilité et d'immunité de l'Etat d'Israël. La démission égoïste des régimes arabes, réputés intransigeants sur la question palestinienne, a ouvert un boulevard devant l'hégémonie d'abord idéologique de l'Iran et ses prolongements idéologiques et géostratégiques, le Hizbollah libanais et le Hamas palestinien. La “flottille de la liberté” a créé une occasion pour leurs pendants algériens et turcs, notamment de s'engouffrer dans le vide stratégique. Voyons comme le Hamas algérien a réussi à transformer l'émotion populaire en adhésion partisane, dès le lendemain du drame. Rien de plus efficace que le sang pour le recrutement islamiste ! Pendant qu'Israël interdit à quiconque d'entrer à Gaza, Hamas l'interdit à Mahmoud Abbas qui, lui, se retrouve avec deux fronts, Israël et Hamas, et deux soutiens creux, la “communauté internationale” et le “monde arabe”. Ces Etats, qui, comme l'Algérie, mais aussi leurs opinions, sont débordés par leurs activistes islamistes légitimés et renforcés par une cause sacrée n'ont en plus que le choix de leur emboîter le pas. Être avec Hamas ou contre la Palestine : voici l'alternative à laquelle nous contraint l'expansionnisme israélien conjugué à l'opportunisme islamiste, et tous deux parvenus au consensus objectif contre un Etat palestinien démocratique. M. H. [email protected]