La venue de Yasmina Khadra à Constantine, après un franc succès réalisé la veille à Annaba grâce à l'initiative de son éditeur algérien, Yassine Hannachi, a tout simplement dévoilé l'autre facette enfouie de cette ville et sa région dont le roman demeure le fief. Ceux qui s'attendaient à une réplique acerbe de Yasmina Khadra aux récentes fléchettes dont il a été destinataire étaient sortis persuadés que celui-ci n'était pas venu pour “crever” un abcès littéraire. L'auteur de l'Ecrivain s'est surpassé élégamment pour placer Boudjedra dans la cour des grands écrivains algériens. La polémique infondée et la détestation n'ont pas de place dans le verbe, la métaphore et autre description de cet auteur, traduit dans 40 pays. C'est a priori ce dernier motif qui constitue la réponse éloquente aux “détracteurs”. Il aura dévoilé aux Constantinois ses repères, ses ressources, son parcours et son “algérianité” indéfectible lundi passé dans un théâtre archicomble. Avec son talent de conteur, il a plongé d'emblée ses adeptes dans une autobiographie s'apparentant à un recueil. Point de place pour un modérateur. L'éditeur se chargeait de le faire sans enlaidir les interventions du grand lectorat présent. Khadra a su charmer les présents par la magie de la facilité de ses expressions tout aussi simples que riches en sens.Après avoir rappelé ses origines, l'écrivain a ouvert le débat. Quoique des interrogations n'aient pas porté exclusivement sur ses écrits, elles ont permis toutefois de dissiper autant de non-dits et de mauvaises interprétations qui ont valu à l'auteur plus de deux années d'absence. L'auteur algérien d'expression française aura réitéré ses propos aux allégations selon lesquelles il aurait traité les Algériens de “fous”. Il n'a pas manqué de se défendre en affirmant que certains titres de presse ont déformé ou mal interprété ses dires. Epris du verbe, Yasmina Khadra attestera que les pires ennemis des arts ce sont “la détestation et le fallacieux”. Réagissant aux dernières déclarations de Rachid Boudjedra, Yasmina Khadra s'est abstenu d'une polémique stérile. Cela s'est traduit par sa réponse à ce sujet. “Boudjedra reste un grand écrivain. Il a le droit de penser ce qu'il veut sur mes écrits”, répondait prestement l'auteur des Hirondelles de Kaboul. Au passage il rendra un grand hommage à son “idole” Malek Haddad pour son “amour farouche pour le verbe” comme il n'a pas éclipsé les autres écrivains algériens Boualem Sansal, Anouar Benmalek ou encore Salim Bachi. Maïssa Bey semble tenir le haut du pavé des écrivaines algériennes chez Khadra. En parallèle, il fera savoir que l'adaptation en film de son avant-dernier roman Ce que le jour doit à la nuit par Alexander Arcady est sur la bonne voie. Le réalisateur attend une autorisation des responsables algériens. “Il est tout de même inconcevable qu'un livre qui parle de l'Algérie soit tourné ailleurs que dans son fief original”, devait-il s'interroger. Mais aux dernières nouvelles, il semblerait que le fameux quitus ouvrant droit à ce chantier cinématographique ait été accordé. La rencontre a été suivie par une séance de signature au niveau cette fois-ci de la librairie des éditions Média-Plus. Ainsi une file s'est formée pendant plus de trois heures. Yasmina Khadra rencontrait ses lecteurs presque en tête-à-tête, les flashs n'ont cessé d'illuminer la librairie. Et pour l'Olympe des infortunes, son dernier roman, le boycott par la presse française n'a pas influé sur les lecteurs qui se l'arrachaient pour le faire dédicacer. L'auteur s'est vu discerner par le wali de Constantine la médaille du mérite, pour ses œuvres. La direction de la Culture en a fait autant.