Après l'assaut meurtrier israélien contre la flottille de la paix et l'arraisonnement du navire affrété par d'autres ONG sous pavillon irlandais, plusieurs associations s'organisent pour envoyer leurs propres navires en direction de Gaza. L'Iran d'abord, avec l'annonce de l'envoi de trois navires et d'un avion d'aide humanitaire affrétés par son Croissant-Rouge. Prévue initialement pour la fin de la semaine dernière, la mission est reportée à la fin du mois de juin en raison de “l'afflux de volontaires”, Téhéran parle de 20 000 inscriptions ! Déterminé à briser le blocus, le Croissant-Rouge iranien envisage de se faire escorter par les Pasdarans (Gardiens de la Révolution). Selon Ali Shirazi, représentant d'Ali Khamenei, le Guide suprême de la Révolution islamique iranienne, la milice armée du pouvoir n'attendrait plus que la décision du Guide pour mettre en branle ses forces navales et escorter la flottille vers Gaza, en faisant usage de ses capacités et équipements militaires. En réalité, ce ne sera pas la première tentative iranienne de pénétrer dans l'enclave palestinienne. En janvier 2009, un navire iranien chargé d'aide humanitaire avait été arraisonné au large des côtes de Gaza par l'armée israélienne. Affrété par le Croissant-Rouge, le bateau avait été contraint de décharger sa cargaison en Egypte. Pour atteindre Gaza, le convoi maritime iranien doit nécessairement passer le canal de Suez. Si elle est escortée par les corvettes des Pasdarans, il paraît assez improbable que l'Egypte lui ouvre l'accès. Quand bien même le Caire a revu à la baisse ses mesures d'embargo contre les Palestiniens de Gaza. En Israël, l'initiative iranienne est tout de même prise au sérieux, au point où son ministère de la Défense a monté d'un cran son niveau d'alerte, averti qu'aucun bateau étranger n'atteindrait Gaza, quitte à faire encore usage de la force. L'initiative iranienne, selon des commentateurs de la scène proche orientale, vise “à voler la vedette à la Turquie”. C'est d'autant plus probable qu'Ankara s'est détourné de son allié israélien, le menaçant de rupture diplomatique depuis l'agression de son navire au large de Gaza, une agression qui s'est soldée par 9 morts turcs, assassinés froidement par les unités spéciales d'Israël. Et les Turcs s'étaient démenés comme des fous pour essayer de faire condamner leur allié stratégique par le Conseil de sécurité. Ils ne sont pas parvenus à leur fin car les Etats-Unis veillent au grain. À regarder de près, l'entrée en jeu des Iraniens dans les efforts des ONG pour briser l'embargo qui frappe le million de Gazaouis depuis 2006 prête à suspicion. Des navires battant pavillon iranien encadrés par des Pasdarans, il n'en faudra pas plus à Israël pour tenter d'arrêter ce convoi avec plus de force qu'avec le Mavi Marmara turc. Ce qui provoquera la guerre dans cette région poudrière et pas seulement à cause du conflit israélo-palestinien. Il reste que le grain de sable iranien intervient au moment où la pression s'accentue sur Israël. Les Etats-Unis, l'un des rares pays à ne pas avoir condamné Israël pour le raid contre la flottille de Gaza, et Ban Ki-moon, le chef de l'ONU, ont joint leurs voix aux appels à une enquête internationale sur les faits malgré le refus catégorique de Netanyahu. Celui-ci, le dos au mur, consent néanmoins à organiser sa propre commission d'enquête à laquelle il offre d'adjoindre deux personnalités internationales indépendantes. Les ONG occidentales sans lesquelles, il faut le souligner, les flottilles de paix seraient impossibles à monter, perçoivent, de leur côté, très mal l'interférence iranienne. Même le Croissant-Rouge européen a fait part de ses réserves. Son directeur, Ali El-Moujahid, aurait préféré une action concertée par toutes les antennes du monde arabe : on n'a rien contre eux les Iraniens, mais leur Croissant-Rouge a décidé de faire cavalier seul… De notre côté, on a décidé d'organiser une flottille avec les Croissant-Rouge de tous les pays arabes. La nouvelle flottille partirait d'Europe dans les semaines à venir. Pour son responsable, l'organisation de ces actions doit demeurer pacifique et surtout éviter de tomber dans le piège des Israéliens en répondant à la provocation : “Les autorités israéliennes pourront contrôler les bateaux si elles le souhaitent.” Avant la prochaine flottille des Croissant-Rouge, un navire fait route sur Gaza depuis le Liban avec à son bord des vivres, des médicaments et des consommables et des députés européens. Le navire s'appelle Naji-el-Ali, du nom d'un caricaturiste palestinien, il a été affrété par Free Palestine et Reporters sans chaînes. Le navire compte également à son bord une cinquantaine de journalistes et plusieurs médecins. Free Gaza, qui a été arraisonné, a également annoncé son intention de revenir à Gaza : “Nous avertissons M. Netanyahu que nous allons revenir dans les prochains mois avec une autre flottille et que ses actions, ainsi que celles de ses soldats ont dynamisé des milliers de personnes qui se sont présentées pour nous aider et pour participer au prochain voyage.” Alors que la communauté internationale presse de plus en plus Israël de revenir sur le blocus, l'Etat hébreu tente de décourager les émules en multipliant les communiqués, assurant que l'aide humanitaire parvient bien aux Gazaouis ! Mais, la coupe est pleine, on a senti la gêne de certains pays, y compris des Etats-Unis qui, bien sûr, n'approuvent pas la réaction de Netanyahu et le condamnent assez mollement. Tout se passe comme si les Etats-Unis n'arrivaient pas à infléchir vraiment les positions israéliennes des plus dures. On l'avait déjà constaté avec les colonies. On le voit encore aujourd'hui dans les attaques contre les flottilles de la paix. Le dos au mur, Netanyahu cherche à accentuer la tension dans la région. Propagande ! L'Arabie Saoudite autoriserait Israël à survoler son espace aérien dans l'éventualité d'un raid contre l'Iran et a procédé à des tests pour adapter sa défense aérienne, a rapporté le Times de Londres, citant des sources militaires dans le Golfe, certainement israéliennes. Cependant, à Ryad, le ministère des AE a catégoriquement démenti “ces allégations mensongères”. Dans un communiqué reproduit par l'agence officielle SPA, Ryad réaffirme sa position ferme qui refuse toute violation de sa souveraineté ou l'utilisation de son espace aérien de la part de n'importe qui pour agresser un pays. Il est évident que cette politique s'applique aux autorités d'occupation israéliennes avec lesquelles nous n'avons aucune relation, a indiqué le ministère saoudien. Heureusement que Netanyahu n'est pas au bout de ses peines : les associations de la flottille humanitaire Free Gaza, qu'il a arraisonnée le 31 mai, entendent le poursuivre devant la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye.