Au coup de sifflet final de l'arbitre, les premières personnes rencontrées dans la rue semblaient totalement aphones, les yeux hagards, comme perdues au milieu de nulle part. À Sidi Abbaz, quartier d'habitude très mouvementé, rares sont les gens qui ont “pu” sortir de chez eux. Même ceux qui suivaient le match au très populaire café Ennoudjoum se sont tus en même temps, se réfugiant dans un silence de cathédrale, comme si la terre venait de s'arrêter de tourner. Hébété, chacun cherchant à avoir une explication chez l'autre, mais personne n'osait prendre la parole de peur de se faire prendre à partie par ceux qui n'accepteraient aucune espèce d'excuse à cette énième défaite, celle-ci encore plus grave, ayant eu lieu au pays de Mandela et devant les yeux de Zizou. “Ce n'est pas possible, je n'arrive toujours pas à expliquer ce schéma de jeu et ces choix bizarres de Saâdane”, telle est la première réaction de aâmi Abdelkader, qui tient une boutique d'articles de sport au centre-ville. Son ami, qui avoue avoir laissé quelques larmes couler tout à l'heure, a eu ces pensées pour les inconditionnels supporters partis au fin fond du continent africain. “Je ne veux, à aucun prix, être à leur place”. Même les rares filles croisées semblaient moins coquettes, la défaite les ayant évidemment, elles aussi, affectées. Partout, la tristesse se lisait sur tous les visages, de 7 à 77 ans, et même au-delà. Peu de voitures circulaient sur les grandes artères. Même les forces de police et de gendarmerie se faisaient discrètes, comme si la ville fut tout à coup vidée de ses habitants. Ni bus ni taxi, rien ! Les commerces, même ceux de “zgag Lihoud” d'habitude si vivants, sont aussi restés tristement clos donnant à l'ensemble un aspect de ville morte.