Les regards sont braqués maintenant sur Bart De Wever et Elio Di Rupo qui doivent faire preuve d'imagination pour s'entendre et former dans les jours à venir un gouvernement, réformer l'Etat belge et prendre d'importantes décisions budgétaires. Le roi Albert II, chef de l'Etat, a reçu les deux grands vainqueurs des élections législatives de dimanche en Belgique : Bart De Wever, le président de la Nouvelle alliance flamande (NVA) qui a fait monter la fièvre “indépendantiste”, et Elio Di Rupo, président du PS francophone. Le roi, on l'oubli trop souvent, garant des institutions et de l'unité belges, devait rencontrer d'autres dirigeants pour tenter de trouver la voie d'une possible coalition ministérielle. À l'évidence, la démarche ne sera pas simple tant le scrutin a mis en évidence les divergences entre la Flandre et la Wallonie, mais rien n'est perdu, le consensus reste toujours de mise. À examiner les déclarations et intentions du patron de la NVA autonomiste et farouchement anti-francophone, selon ses slogans de campagne, l'heure serait plutôt à l'apaisement. Bart De Wever a mis de l'eau dans son vin, en mettant de côté carrément ses revendications d'un Etat flamand. Idem chez le francophone socialiste, qui s'est déclaré à examiner sérieusement les récriminations flamandes. Certainement qu'après le triomphe séparatiste de dimanche, la Flandre obtiendra plus d'autonomie, mais pas de scission pour Bart De Wever, même si sa formation indépendantiste de droite a fédéré une partie de ceux qui entendent faire disparaître la Belgique. Dans le fond, sa victoire n'est pas si triomphante que ne l'avait clamé les médias : le NVA n'a obtenu que 27 sièges sur les 150 de la nouvelle chambre des députés. Et, au total, ce sont près de 30% des Flamands qui ont voté pour des formations séparatistes. En fait, la situation reste la même avec une nouveauté pour la Wallonie, la région francophone et clairement ancrée à gauche, le PS a retrouvé son leadership en enlevant 26 sièges. Et tous les grands partis francophones prônent le maintien d'un Etat fédéral. Les regards sont braqués maintenant sur Bart De Wever et Elio Di Rupo qui doivent faire preuve d'imagination pour s'entendre et former dans les jours à venir un gouvernement, réformer l'Etat belge et prendre d'importantes décisions budgétaires. NVA et PS ont indiqué, après les résultats du vote, que rien n'était impossible. L'indépendantiste flamand a même indiqué laisser le PS prendre la tête du gouvernement ! Les francophones ont le choix : négocier un vrai accord, soit s'en tenir à l'intenable statu quo qui a fait tomber deux gouvernements. Bart De Wever, qui s'est redit ouvert à la discussion et en attente d'une initiative concrète du roi, a plaidé pour que la Belgique émerge des incertitudes, répétant qu'il était prêt à céder le poste de Premier ministre aux francophones qui ne l'ont plus obtenu depuis 37 ans. On est loin des commentaires dramatisants d'hier des médias et des leaders politiques, Belges et Européens, surtout Français, qui annonçaient la mort de la Belgique et de sa monarchie…. Le NVA a grimpé de façon spectaculaire, mais son leader sait qu'il n'a pas le pouvoir de faire éclater son pays. Rien n'est moins vrai, et il l'a reconnu : 70% des Flamands ne l'ont pas suivi dans le séparatisme. Et puis, dans l'arithmétique du Parlement, il n'a pas de grande influence avec 20% des sièges. Son rival le PS en a autant et il peut se coaliser avec d''autres forces beaucoup plus que les indépendantistes flamands. De surcroît, Bart De Wever se révèle ne pas être l'homme à l'image brutale et primaire qui avait été donnée donnée de lui durant la campagne électorale. Depuis son élection, ne s'est-il pas permis de faire une ouverture en direction d'une situation que tous les parlementaires flamands avaient refusée avant lui : un Premier ministre francophone. Ce serait la première fois depuis presque 40 ans. Elio Di Rupo, socialiste de la nouvelle génération, a lui aussi admis recevables certaines revendications flamandes concernant les impôts, la gestion de proximité et surtout le statut des six communes flamandes hors Bruxelles, pierres d'achoppement, de frictions et de tensions entre les deux communautés. Le PS, qui a ouvertement levé le tabou du “séparatisme” belge, se dit prêt à négocier les grandes réformes institutionnelles qui doivent effacer le spectre de la scission. Flamands et francophones qui ont appris à se connaître savent aujourd'hui que rien ne peut se faire sans un accord entre les communautés linguistiques. Le fait est donc qu'il faudra une négociation pour arriver à une redéfinition du cadre fédéral belge. Elio di Rupo, le président du parti socialiste wallon, certainement le nouveau Premier ministre de la Belgique, est persuadé, tout comme son rival Bart De Wever, l'indépendantiste flamand, que cette élection doit bien être l'occasion de regarder la réalité en face et de définir ce que les Belges souhaitent encore avoir en commun. Pour le reste, les réalités régionales sont déjà bien ancrées. Les discours séparatistes auront alors servi à faire peur, à avancer les idées et à mettre en action une nouvelle manière de gouverner, toujours plus proche des citoyens.