L'association M'barek Ath Menguellat, d'Ighil Bouamas, en collaboration avec l'APC d'Iboudraren, rend hommage à ses femmes martyres. En effet, c'est dans un climat de convivialité que les jeunes ont voulu déterrer de l'oubli les noms de leurs héroïnes tombées au champ d'honneur. Après cinquante ans de silence et d'indifférence marqués par plusieurs générations, les enfants d'Ighil Bouamas se sont attelés à recueillir le maximum de témoignages et d'informations sur ces valeureuses citoyennes tombées au champ d'honneur. Les héritiers de ces femmes “portées disparues” ont été conviés à venir assister à la commémoration historique. “J'avoue que c'est la première fois qu'on évoque le nom de ma sœur qui était la première femme à s'engager dans le combat pour la liberté”, dit Si Amer, venu d'Alger pour la même occasion. Un octogénaire intervient dans la foulée pour dire qu'il y a d'autres victimes que l'association avait omis de citer. On lui signifie que l'hommage est simplement une évocation des martyres et non pas des victimes civiles ou de mousseblat. Car, au fait, tous les villageois avaient payé directement ou indirectement un lourd tribut. Des questions pertinentes sont posées à l'intention des responsables qui pourraient éclairer l'opinion sur des faits et détails importants. “On se rappelle de deux endroits charniers : le puits du CEM de Beni Yenni et celui de l'école primaire de Tassaft où l'on aurait extrait des ossements et des crânes aux chevelures indiquant qu'il s'agit de corps de femmes, et on se demande si ces restes avaient trouvé une sépulture ?” dit un membre actif de l'association. L'horreur était à son comble. Ainsi, une conférence est animée par D. Djerbal, historien et directeur de la revue Naqd. “Ces témoins ont une histoire, leur histoire dans un premier temps. Leur identité est dans cette histoire et notre présence comme une tierce personne, l'écoute que nous avons de cette personne en la prenant en compte, on va changer un tant soit peu au cours de l'histoire, car il y a l'histoire qu'elle porte et celle que nous allons transmettre”, dit le conférencier. Un témoignage réunissant plusieurs acteurs et actrices de la guerre de libération a fait l'objet d'un film documentaire visionné à l'occasion sur écran géant pour l'assistance. Le montage a été l'œuvre de la commission de l'écriture de l'histoire. Pour le côté animation, le ballet de danse classique de la maison de la Culture de Tizi Ouzou a subjugué l'assistance. Et comme arrière-plan du décor, des tableaux de peinture et des dessins inspirés des scènes de la barbarie coloniale replacent les faits dans la conjoncture de la guerre. Rappelons que parmi les 7 femmes martyres, 4 n'ont pas connu de sépulture. La fresque dédiée à ces femmes porte leur noms et cette interpellation : “Gens d'Ighil Bouamas, donnez-nous un nom, une sépulture, un toit”. Cela rappelle aussi que parmi les survivantes, il y a de nos jours celles qui n'ont même pas un toit. “La guerre nous a happé nos chers maris et l'indépendance nous a ratées”, ironise l'une d'elles.