“Franchement, en venant de Tunisie à Batna, nous ne nous attendions pas y trouver un beau théâtre et un public aussi chaleureux et avenant que celui-là, un public ayant du goût, appréciateur du quatrième art. Franchement, je lui tire chapeau”, nous confie à chaud la comédienne tunisienne à la fin de la représentation de la pièce théâtrale Al-Halwa, avant-hier au Théâtre régional de Batna, dans le cadre des Journées théâtrales maghrébines. À la septième soirée de ces journées, devant une salle archicomble, la troupe tunisienne de Monastir a conquis le cœur du public batnéen par la représentation de la pièce Al-Halwa, écrite et mise en scène par le Tunisien Khaled Chenane et interprétée par quatre comédiens. Cette pièce, inspirée de la chanson de Al-Halwa de Sayed Derwich, selon Khaled Chenane, son auteur et metteur en scène, est un ensemble de scènes qui synthétise et regroupe des faits ou des informations épars de notre quotidien social, politique et culturel et les rassemble en un tout cohérent pour les dénoncer. La pièce théâtre Al-Halwa est difficilement classable, elle est plutôt du genre théâtre expérimental. La plupart du temps, la pièce entreprend une critique railleuse, satirique et des individus et des pays du monde pour les tourner en ridicule, pour les miniaturiser, pour parler des travers et des vices de nos contemporains. Le spectacle s'ouvre et se termine sur la même chorale fredonnant la chanson Al-Halwa, écrite par le poète Bayram El-Tounsi, et chantée par Sayed Derwich. Al-Halwa, d'une durée d'une heure, est composée de six tableaux articulés par de petits spectacles exécutés entre les actes ; une pièce de théâtre qui diffère des pièces classiques. Les tableaux de la pièce Al-Halwa sont intercalés d'entractes chantés et, malgré un décor dépouillé, sont très intelligemment agencés. Deux tableaux sur les six, qui composent la pièce, ont vraiment provoqué l'hilarité du public. Le premier est celui des trois détectives qui enquêtent sur la préparatrice du pain traditionnel, alors que tout le monde achète le pain préparé traditionnellement — c'est du genre gag — et le second est le tableau “Wahdou” (tout seul) qui enchaîne avec plusieurs faits puisés d'événements quotidiens sociopolitiques. La pièce Al-Halwa suscite l'émotion moqueuse du destinataire, traduit chez l'auteur une révolte, disons mieux, le refus d'être complice. Dans cette œuvre, une critique moqueuse des individus, des organisations, des Etats, enfin de tout le monde, se dessine avec l'intention de provoquer ou prévenir un changement. Le public batnéen a réservé aux comédiens tunisiens un accueil enthousiaste, les applaudissements, après chaque acte, n'en finissaient pas, accompagnés parfois de bravos. Les Journées maghrébines enregistrent succès sur succès et présagent un bel avenir au théâtre de Batna pour son développement et sa promotion.