Le ministre russe des Finances est prêt à le faire. En situation de crise, il n'y a pas 36 manières d'agir pour réduire les déficits : accroître les recettes ou diminuer les dépenses. C'est la première solution qu'a choisie Moscou. Son gouvernement a annoncé, fin juillet, le projet de privatisation partielle d'une dizaine de grandes entreprises d'Etat, dont les modalités seront connues cet automne. Selon le ministère du Développement économique, le plan devrait rapporter au Trésor russe 7,6 milliards d'euros dès l'année prochaine, pour un total de 22,4 milliards d'euros à la fin du processus en 2013. Ce sont près de onze entreprises qui devraient être en partie privatisées dans les secteurs du pétrole, des transports ou de la banque. L'objectif officiel du plan est d'utiliser les sommes ainsi dégagées pour ramener le déficit budgétaire du pays, estimé à 5% pour l'année en cours, à 4% en 2011, 3% en 2012 et 2% l'année suivante. Le ministre des Finances, Alexeï Koudrine, vient d'annoncer que l'objectif de son gouvernement était de retrouver un budget équilibré à compter de l'année fiscale 2015. Les marchés boursiers ont bien accueilli l'annonce de cette vague prochaine de privatisations russe. Cependant, la participation des investisseurs privés ne devrait pas dépasser les 30% du capital, l'Etat souhaitant conserver son contrôle sur ces entreprises stratégiques. L'Etat ne peut se permettre d'accentuer la pression fiscale sur les couches populaires, qui n'ont déjà pas grand-chose, et refuse de l'accroître pour les classes aisées. Sa principale source de revenus à l'étranger, les matières premières, baissant, il ne lui restait qu'à économiser ou à vendre ce qui lui reste. Ce qui lui reste, car le pays a déjà subi une énorme vague de privatisation tous azimuts en 1990 avec la thérapie de choc menée par l'économiste américain Jeffrey Sachs. Vente qui a surtout profité aux classes aisées formant ainsi des oligarchies et spoliant les classes populaires. Couplée à une libération des prix (qui sont montés en flèche en entraînant une inflation galopante), ainsi qu'à une criminalité virulente (affrontements à l'arme de guerre dans les rues), cette période n'a pas vraiment laissé un bon souvenir dans la mémoire collective russe. De plus, la presse économique s'inquiète de la vente “au rabais” des parts de ces géants de l'économie nationale. Le quotidien des affaires Vedomosti estime ainsi à 40 milliards d'euros la valeur réelle des actifs potentiellement mis en vente pour les seules entreprises du domaine de l'énergie, et s'interrogeait sur l'origine des investisseurs intéressés par une éventuelle participation dans ces grands groupes d'Etat. Il espérait que les appels d'offres soient “honnêtes et ouverts à tous, notamment aux investisseurs étrangers”, si l'opération devait imiter les privatisations de 1990, autant prêcher dans le désert.