Les intempéries se sont multipliées ces dernières semaines à travers le monde et ont fait des victimes par milliers, alors que les sinistrés se comptent par millions. Phénomène naturel ou conséquence d'un dérèglement climatique avéré ? Les avis sont partagés, même s'il est évident que l'étendue des catastrophes qui frappent de plus en plus durement certaines régions de la planète a quelque chose d'inhabituel, ne serait-ce que par l'ampleur des dégâts causés. Ainsi, les inondations qui ont frappé le Pakistan ont fait au moins 1 600 morts et près de vingt millions de sinistrés. C'est une catastrophe pire que le tsunami de 2004, le tremblement de terre au Pakistan en 2005 et le récent séisme qui a frappé le Cachemire. Certes, l'indigence des services de secours n'est pas étrangère à l'ampleur du bilan, mais la violence des inondations est également sans précédent. Il s'agit d'une mousson dévastatrice, comme on en a rarement vu dans le pays depuis de nombreuses décennies. Pire encore, alors que le bilan est déjà extrêmement lourd et que des millions de Pakistanais sont encore piégés par les eaux et les boues, les secours arrivent au compte-gouttes, malgré l'appel pressant de l'ONU et une épidémie de choléra menace des centaines de milliers d'enfants qui n'ont pas accès à l'eau potable. En Chine, ce sont plus de 1 300 personnes qui ont péri, suite à des inondations soudaines et à des glissements de terrain, qui ont causé par ailleurs des dégâts incommensurables dans le nord-ouest du pays, dans la province de Gansu. L'électricité, l'eau et les communications sont coupées dans certaines régions à forte densité d'habitants tibétains. Environ 45 000 personnes ont été évacuées, tandis que certaines villes sont noyées sous plus d'un mètre de boue, rendant tout déplacement par voie terrestre quasiment impossible pendant plusieurs jours. Plus d'un millier de pompiers et près de 3 000 soldats ont été mobilisés dans les opérations de secours. Rien que pour l'année 2010 et avant la récente catastrophe, les intempéries ont fait plus de 1 100 morts dans le pays, provoquant près de 10 millions d'évacuations et occasionnant la destruction de près d'un million d'habitations. Les dégâts matériels, pour leur part, sont estimés à plusieurs dizaines de milliards de dollars. En Europe aussi, des inondations meurtrières ont fait au moins 15 morts et occasionné d'importants dégâts matériels. La Pologne, la Tchéquie, la Lituanie, mais aussi l'Allemagne ont été plus ou moins durement touchées. Plus de 2 000 foyers étaient privés d'électricité en Pologne et en République tchèque. En Lituanie, de violents orages ont provoqué la chute d'arbres et d'édifices et ont provoqué la mort de quatre personnes. Plusieurs routes sont coupées par les flots et des milliers de foyers sont restés sans électricité. En Pologne, trois morts sont à déplorer et une ville de 20 000 habitants a été lourdement endommagée par les crues, aggravées par la rupture d'un barrage. En Allemagne, les autorités ont évacué 1 400 personnes autour de la ville de Görlitz, où le niveau d'une rivière (La Neisse) est monté de sept mètres. Au sud-est du pays, dans la Saxe, trois personnes ont péri noyées à cause de pluies torrentielles. En République tchèque, le bilan était de cinq morts et de trois disparus. À Prague, des milliers de foyers ont été privés d'électricité et de gaz et à l'intérieur du pays des dizaines de villages sont coupés du monde à cause d'une montée des eaux assez inhabituelle. À l'instar du Pakistan voisin, l'Inde a subi de graves inondations suite à des précipitations qui ont emporté routes, ponts et habitations, et ont fortement endommagé les réseaux électriques et de communication, notamment dans le nord du pays. Le bilan des intempéries est au moins de plusieurs centaines de morts. Plus de 6 000 soldats indiens ont été mobilisés sur terre et dans les airs pour tenter de secourir les personnes piégées par les inondations et les boues. On pourrait ajouter à tous ces drames climatiques les dramatiques incendies qui ravagent la Russie, étouffant le pays, au point que les morgues ont débordé et que des sites sensibles, dont des établissements de traitement de déchets nucléaires, ont été menacés. Certes, Dame Nature a de tout temps eu ses caprices. Ce type d'intempéries a de tout temps existé. Mais ce sont les bilans des catastrophes qui inquiètent, de même que leur fréquence et leur violence. Surtout que toutes ces catastrophes sont survenues quasi simultanément. Le dérèglement climatique n'est-il pas une réalité et les Etats, surtout les plus industrialisés, ne devraient-ils pas prendre leurs responsabilités, contrairement à leur attitude scandaleuse lors du dernier sommet de Copenhague ? Beaucoup de scientifiques et d'observateurs avertis sont persuadés que non seulement le dérèglement climatique est une réalité aggravée par l'activité de l'homme, mais aussi que la population humaine est trop nombreuse, d'où le développement inapproprié des villes et l'occupation de terrains réputés dangereux, pénurie de foncier oblige. Un effort d'adaptation est indispensable, pensent-ils. Mais les dirigeants, surtout ceux des grandes puissances, seront-ils prêts à rompre avec leurs politiques de profits et de stratégies mercantiles à court terme ?