“Il n'est revenu que pour s'illustrer sur la scène internationale et rattraper les voyages qu'il avait ratés… Il confond entre la République et la monarchie.” La session du comité central du FLN a connu des moments forts. Tous les hauts responsables du parti, anciens ou actuels, ont eu à intervenir pour s'exprimer sur la situation que vit leur formation et la candidature de Ali Benflis. Boualem Benhamouda, le prédécesseur de ce dernier, est revenu longuement sur les choix du FLN en 1999 mais en proposant, tout de go, la candidature de son actuel secrétaire général. “Dans quelques mois seulement aura lieu l'élection présidentielle, notre parti est appelé, en effet, à présenter son candidat”, soulignera Benhamouda qui estime que “la situation du pays en 2004 est différente de celle de 1999 qui nous a imposé de plébisciter” la candidature de Bouteflika. L'ancien secrétaire général du FLN expose ses raisons : “La démission inattendu du président Liamine Zeroual, l'instabilité de la situation sécuritaire, en dépit des succès réalisés contre le terrorisme par l'Armée nationale populaire.” L'intervenant ajoutera aussi que “l'idée du candidat du consensus a été édictée par la situation de crise que nous vivions”. Ce sont, selon lui, “autant de facteurs qui ont conduit le parti à entériner la candidature de Bouteflika”. Le FLN a accompli son devoir avec sincérité, mais celui qui a été plébiscité a-t-il respecté ses engagements envers le peuple algérien ? s'interroge Boualem Benhamouda qui affirme que le parti avait donné du temps au Président pour stabiliser la situation, relancer l'économie et réinstaurer la confiance. Dès qu'on a vu Abdelaziz Bouteflika s'installer sur le fauteuil présidentiel, on s'est dit, soulignera-t-il, que “ce n'était là que l'euphorie de la réussite. Mais lorsqu'il a installé les différentes commissions de réforme de l'Etat, de l'Education et de la justice, nous n'avons pas approuvé leurs composantes humaines”. On s'est dit : “Quand bien même ces structures n'avaient qu'un rôle consultatif, et on a laissé faire”. Au printemps 2001, indiquera Benhamouda,“j'ai rencontré le Président à sa demande et ce, dans le cadre des consultations avec les partis politiques, après les événements qu'ont connues les wilayas de Tizi Ouzou et de Béjaïa. J'ai attiré son attention, ajoutera l'ancien secrétaire général du FLN, “de manière dure, pendant deux heures, sur les erreurs commises en matière de politique intérieure et extérieure que désapprouvent le peuple, les responsables, les chancelleries étrangères en Algérie. Nous n'avons pas avisé la presse nationale, dira encore Boualem Benhamouda, parce qu'on considérait qu'on avons conclu avec lui un contrat moral jusqu'à avril 2004. Mais maintenant qu'il s'est passé ce qui s'est passé, il est devenu impossible que nous le soutenions pour un second mandat à la présidence”. L'intervenant avance ses raisons : “Le plébiscite d'avril 1999 n'est pas un chèque en blanc. L'absence de dialogue entre le Président et les partis politiques, les organisations sociales, les collectivités locales et les élus ; la marginalisation du Parlement par la législation abusive par ordonnance ; l'exclusion du Parlement des débats sur des dossiers importants que celui de l'Education nationale ; l'octroi d'enveloppes complémentaires à certaines wilayas et ce, au terme de son mandat, ce qui est sans doute une manière d'acheter des voix pour sa réélection ; la marginalisation du Chef du gouvernement et des ministres dans les décisions de nominations à des postes supérieurs, lesquelles décisions sont concentrées, aujourd'hui, au niveau de la présidence à tel point qu'un simple secrétaire général d'une commune lointaine est désigné par la présidence pour la simple raison que la commune est située au chef-lieu de la wilaya ; l'empêchement des initiatives du Chef du gouvernement et les entraves dont il a été victime dans l'exercice de ses fonctions ; le non-respect de la majorité au Parlement." “Impossible d'appuyer un second mandat pour Bouteflika” La liste des griefs de Benhamouda contre Abdelaziz Bouteflika est longue. Dans son réquisitoire, l'ancien responsable du FLN affirmera : “Je n'ai pas vu de par le monde, un président d'une République démocratique désigner un Chef de gouvernement d'un parti qui n'a que 48 sièges à l'Assemblée”. À propos de la concorde civile, l'intervenant reproche à Bouteflika le fait qu'il parle tantôt de concorde tantôt de réconciliation nationale, un fait qui n'est pas dénué, selon lui, “d'arrière-pensées et fait douter de ses véritables intentions”. Où en sont les régularisations des situations des entreprises publiques, des terres agricoles ? s'interroge, par ailleurs, le prédécesseur de Benflis qui estime que “les cinq années passées à la présidence ne sont-elles pas suffisantes pour répondre à la revendication principale des millions d'agriculteurs. Où sont les réformes du système monétaire, de l'école ? Où est le programme destiné aux régions du sud ?” Ce sont autant de questions que s'est posé Benhamouda qui revient, également, sur le volet diplomatique en reprochant à Bouteflika “le fait d'avoir privilégié la politique extérieure sur la politique intérieure”. L'intervenant ne va pas avec le dos de la cuillère pour s'attaquer au locataire d'El-Mouradia. “Le président de la République, dira-t-il, donne l'impression qu'il n'est revenu que pour s'illustrer sur la scène internationale et rattraper ce qu'il avait raté comme voyages”. “Les nominations aux postes supérieurs, ajoutera-t-il, n'obéissent qu'au seul critère de l'amitié et des liens de parenté”. Bouteflika, lancera Boualem Benhamouda : “Confond entre le système républicain et la monarchie” Il l'accuse d'avoir “détourné le pouvoir en utilisant les moyens de l'Etat pour le seul objectif de sa réélection pour un second mandat et ce, en piétinant la neutralité de l'administration”. Bouteflika, a eu, selon lui, “recours à des méthodes immorales pour faire taire la presse nationale à laquelle il a préféré la presse étrangère à chacune de ses sorties médiatiques”. Le tableau qu'a dressé Benhamouda de la gestion de Bouteflika des affaires publiques est sombre à tous points de vue. C'est pour cela qu'il voit dans la candidature Benflis à la prochaine élection présidentielle “un moyen de redorer l'image d'un Etat algérien qui se respecte". S. R.