A Conakry, le Conseil national de transition, le Conseil national de la communication et le Conseil économique et social sont montés ces jours-ci au créneau pour tenter de sortir le pays de l'impasse dans laquelle il se trouve en ce moment, pour cause de blocage de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). À l'occasion de leur rencontre jeudi à Dakar, les chefs de mission de maintien de la paix de l'ONU en Afrique de l'Ouest se sont dit, eux aussi, préoccupés par la situation prévalant en Guinée. Said Djinnit, émissaire du secrétaire général de l'ONU en Afrique de l'Ouest, a expliqué que l'ONU a lancé un appel, en particulier aux deux candidats, pour qu'ils puissent surmonter les difficultés autour de la question de la présidence de la Commission électorale nationale indépendante et créer ainsi les conditions pour que le pays s'engage, rapidement, dans l'organisation du deuxième tour de la présidentielle. Le diplomate algérien a évoqué l'envoi de Casques bleus d'Afrique de l'Ouest à la Guinée. Le deuxième tour de l'élection présidentielle, déjà différé, est censé se tenir le 10 octobre mais cette nouvelle date est incertaine du fait d'un litige sur la composition de la commission électorale indépendante. Au premier tour, fin juin, l'ancien Premier ministre Celou Dalien Diallo est arrivé en tête avec près de 44% des voix. Il sera opposé au second tour à Alpha Condé (18% au premier tour). Entre difficultés d'organisation du second tour et accusations d'irrégularités de part et d'autre des camps en compétition, tandis que l'ONU redoute que le processus censé rétablir un pouvoir civil en Guinée ne tourne mal, les pays voisins appréhendent l'exportation chez eux de heurts ethniques en latence. La Guinée étant frontalière de six pays, le scénario le plus dramatique pourrait aboutir à des déplacements de populations par-delà les frontières, susceptibles de déstabiliser les pays voisins. Diallo tire l'essentiel de ses voix de l'ethnie Peul, Condé est lui porté par l'ethnie Malinké. Des heurts ont déjà éclaté entre membres de ces groupes de population. Et pourtant, le pays n'a pas encore pansé le massacre du stade de Conakry (28 septembre 2009), ses responsables présumés n'ont toujours pas été inquiétés. Le 8 février 2010, la justice guinéenne a bien ouvert une information judiciaire sur les faits survenus le 28 septembre et durant les jours qui ont suivi (séquestrations, exécutions sommaires et chasse aux manifestants). Mais, depuis, il n'y a eu ni audition ni interpellation. Au sein des forces armées, au pouvoir et impliquées dans le massacre, ces événements restent un sujet tabou. Alors que plusieurs organisations locales et internationales de défense des droits de l'homme recommandaient que tous les responsables supposés des tueries soient suspendus et que des poursuites judiciaires soient diligentées contre eux, rien n'a été fait. Même contre les trois personnes incriminées par les enquêteurs internationaux. L'ex-président Dadis est toujours en “convalescence” au Burkina, Toumba, son homme de main, organisateur des tueries, a “disparu”. Quant à Moussa Tiégboro Camara, il a non seulement été promu, mais il occupe toujours son poste ministériel. Les éléments des forces de sécurité présents au stade, pourtant connus de leurs pairs, de leurs supérieurs et parfois des victimes, n'ont pas été officiellement identifiés. La situation est tendue car la Guinée Conakry s'est révélée, à son tour, un scandale géologique. Son sous-sol renferme de l'or disséminé sur toute l'étendue de son territoire. Mais les principaux gisements sont concentrés vers les parties nord-est et sud-est du pays. En plus de l'or, le pays produit aussi du diamant dans sa partie sud à Kindia, à une centaine de kilomètress de Conakry, la capitale, de l'uranium dans sa partie sud-est et dans la région du Fouta et de l'aluminium (la première usine d'aluminium en Afrique fut implantée en Guinée en 1963 par Sékou Touré). Et pour attirer davantage les appétits étrangers, la Guinée Conakry est assise sur des gisements de pétrole. Les Américains sont déjà sur les lieux déjà, ils seront suivis par les chinois. Voilà ce qui explique en grand partie a poudrière guinéenne.