Les transformateurs de lait aussi bien public que privé ne cachent pas leur colère face à la pénurie de lait qui pénalise les consommateurs. Contactés hier par téléphone, de nombreux responsables de ces unités nous ont relaté le calvaire qu'ils endurent quotidiennement en raison de cette pénurie de poudre au lait. “Nos camions passent parfois trois à quatre jours devant les dépôts de l'Office national interprofessionnel du lait (Onil) avant de revenir bredouille”, a affirmé le responsable de l'unité Giplait de Draâ-Ben-Khedda dans la wilaya de Tizi Ouzou. Cette unité, qui approvisionne plusieurs régions du centre du pays notamment la wilaya de Tizi Ouzou, Bouira et l'est de Boumerdès, et qui emploie plus de 400 travailleurs, fonctionne depuis trois mois au ralenti. “Nos camions se déplacent parfois jusqu'à Annaba sans être sûrs d'être approvisionnés en poudre”, regrette notre interlocuteur, qui précise que l'usine qui produit d'habitude jusqu'à 350 000 litres par jour travaille selon l'arrivage et la disponibilité de la poudre. Même situation que vit l'unité Bettouche d'Alger qui, à elle seule, produit 300 000 litres par jour dont 90% de sa production sont destinés pour la wilaya d'Alger, et qui bute à d'énormes difficultés pour satisfaire les consommateurs en raison de l'absence de poudre au lait. “Nous n'arrivons plus à gérer une situation devenue insupportable à cause des perturbations dans l'approvisionnement de la poudre”, nous a affirmé M. Bettouche, précisant que “les transformateurs de lait tout comme les consommateurs sont à la merci de ceux qui sont censés assurer leur approvisionnement en poudre”. M. Bettouche s'interroge sur la véracité des chiffres communiqués par l'Onil relatifs à la collecte du lait cru censé remplacer la poudre. “Ces chiffres sont loin de correspondre à la réalité et c'est l'une des causes de cette pénurie”. Et de s'interroger sur les restrictions de la commercialisation du lait en sachet dans les seules limites territoriales de la wilaya d'implantation de la laiterie. “Notre unité, qui a réalisé de gros investissements, peut produire jusqu'à 1 million de litres par jour, mais on nous interdit de commercialiser notre produit en dehors de la région d'Alger”. Les mêmes inquiétudes ont été exprimées par M. Ounouguene, responsable de l'unité Pâturage d'Alger, qui approvisionne en sachet de lait les wilayas de Tizi Ouzou, Bouira, Béjaïa et Alger. “Nous avons payé notre approvisionnement en poudre depuis un mois sans que notre demande ne soit satisfaite”, affirme ce transformateur dont l'unité arrive à peine à produire 50% de sa production habituelle estimée à 100 000 litres par jour. M. Ounouguene s'interroge, lui aussi, sur l'authenticité des statistiques concernant la collecte du lait cru. “Certains responsables fournissent au ministère de l'Agriculture des statistiques erronées sur la collecte du lait cru et les besoins des laitiers en poudre de lait, c'est ce qui explique, selon lui, la réduction drastique des quotas en poudre de lait décidée par l'Onil”, précise-t-il. Et d'ajouter : “Je suis collecteur et qu'on me dise où se trouvent ces quantités de lait cru qui en réalité n'existent pas.” À Boudouaou, l'unité de l'ex-Onalait qui approvisionne les wilayas d'Alger et de Boumerdès a vu sa production diminuer de 30%. Cette unité, qui d'habitude produit jusqu'à 320 000 litres/jour ne produit que 250 000 et parfois moins, nous a affirmé un cadre de cette filiale. Même situation que continue à vivre l'unité privée Coprolait située, elle aussi, à Boudouaou et qui bute à des difficultés d'approvisionnement en poudre. “Si ça continue comme ça, nous risquons de fermer nos unités car nous ne pouvons continuer à travailler à perte”, affirment la plupart de nos interlocuteurs. Nos tentatives pour avoir l'avis des responsables de l'Onil sont demeurées vaines.