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La conserverie CBA cédée pour une bouchée de pain
Alors que ses 300 salariés se désolent de cette liquidation
Publié dans Liberté le 21 - 11 - 2010

Après deux années de procédure, le tribunal administratif d'Azzaba, saisi aux fins de statuer sur l'état de cessation de paiements de l'entreprise Conserverie Benazzouz (CBA), a finalement opté pour la liquidation.
Le mercredi 29 septembre dernier, le juge s'est prononcé pour la liquidation de la Conserverie Benazzouz au motif que le propriétaire n'arrivait plus à faire face à la dette contractée auprès de la BNA et qui a fini par atteindre le montant de 45 milliards de centimes, entre intérêts et principal. Toutefois, le rachat de l'usine a profité à un particulier pour un montant très en deçà de sa valeur vénale.
Ainsi, la vente est résolue à 18 milliards de centimes au bout de la septième adjudication, les six premières ayant été considérées infructueuses.
Une décision qui marque officiellement la fin de l'usine qui est implantée à Boumaïza, fermée depuis le début de l'année 2009. Mais qui ne met pas fin au combat de près de 300 anciens salariés, qui ont ainsi perdu leur emploi, et d'un opérateur économique qui voit son outil de production lui filer entre les doigts. Un mouvement auquel s'associent également les exploitants agricoles de la région déjà ébranlés par la fermeture, ces seules dernières années, de pas moins de quatre autres conserveries, dans pratiquement les mêmes conditions.
Tous continuent d'espérer qu'une intervention des plus hautes instances du pays vienne mettre le holà. La CBA, implantée sur un terrain de 37 000 mètres carrés, a une capacité de production de 12 900 tonnes de conserves, dont 7 000 tonnes de double concentré de tomates, dont le chiffre d'affaires atteint une moyenne de 70 milliards par an. L'usine a été mise en service en 1988. Son propriétaire avait contracté un crédit auprès de la BNA d'Annaba pour démarrer la campagne de 1993, un crédit d'un montant de 60 millions de DA qu'elle remboursait régulièrement jusqu'en 2004, ceci bien qu'en 2002, la banque eut bloqué tous les crédits de campagne. Les versements, qui au départ avoisinaient les 295 millions de DA, avaient été considérablement réduits pour n'atteindre en 2003 que 9,5 millions de DA.
Dans le même temps, la CBA s'était acquittée des impôts et taxes d'un montant de 23 milliards de centimes. Ainsi, confrontée aux échéances, la conserverie devait faire face à la crise qui frappait le secteur de la tomate industrielle caractérisée par la concurrence déloyale, à savoir l'importation frauduleuse du triple concentré de tomates.
Si la conserverie Benazzouz est devenue le symbole de la lutte des ouvriers et des agriculteurs, “pour sauvegarder des emplois sacrifiés au nom des intérêts de la banque”, la vie de cette entreprise de transformation de tomates, de fabrication de harissa et de compotes d'abricots n'a pas toujours été placée sous le signe du conflit, alors que son propriétaire remue depuis des mois ciel et terre pour recouvrer son bien.
Celui-ci se promet de ne pas se résigner à ce qu'il qualifie de “dépossession arbitraire” et fait valoir une montagne de documents pour se réapproprier sa conserverie, qu'il affirme avoir démarrée sur fonds propres. “Cette vente ne s'est pas déroulée selon les procédures habituelles. Elle est entachée d'irrégularités, et je demeure convaincu que cette transaction peut être frappée de nullité, pour peu qu'on veuille bien reconsidérer la question de la dette qu'on m'a imputée”, s'indigne M. Benameur.
Contestant jusqu'au déroulement de l'adjudication, il dénonce le fait de n'avoir pas été invité à y assister. Selon ses déclarations, il n'aurait pas été notifié pour assister à la vente aux enchères de l'usine et ainsi privé de son droit de s'y opposer éventuellement au motif que l'huissier de justice n'avait pas son adresse et ne pouvait le contacter par conséquent. Ce qui révèle, explique-t-il, qu'on l'ait tenu éloigné à dessein pour pouvoir brader la conserverie. Il en veut pour preuve le fait qu'il n'y avait, le jour de la mise à prix, que 4 acquéreurs potentiels.
“Vous vous rendez compte, 18 milliards de centimes pour une superstructure qui en vaut quatre fois plus ! Cette enchère ne couvre même pas la valeur du terrain d'assiette sur lequel est bâtie la conserverie”, dit-il. Toujours selon ses dires, l'estimation des biens meubles et immeubles aurait été réalisée par un expert en son absence, ce qui n'est pas conforme à la loi, objecte-t-il. De plus, la décision du ministère de l'Agriculture et du Développement rural concernant le rééchelonnement des dettes et la prise en charge par ce même département des intérêts induits par le rééchelonnement n'a a aucun moment été respectée, et ce malgré la demande express que le propriétaire de la conserverie affirme avoir introduite auprès de l'institution bancaire.
À ce propos, le directeur régional de la BNA est formel : il n'a jamais eu connaissance de cette décision du ministère de l'Agriculture, si ce n'est par ouï-dire au cours d'une réunion avec les opérateurs agricoles.
Le directeur de la BNA assure que la CBA n'étant plus en mesure de payer ses dettes, l'institution était alors en devoir de recourir à la justice pour recouvrer les créances détenues. Il affirme également que la banque s'est, en ce qui la concerne, opposée à la vente du fait que le prix de cession est très inférieur au prix réel de la conserverie, mais la justice en a décidé autrement en application, dit-il, des articles du code de procédure civile administrative, malgré l'opposition de l'avocat.


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