Pour bien mener sa politique contre l'immigration, le ministre français de l'Intérieur prendra trois mesures. D'abord, il commence entre autres par donner un tour supplémentaire au robinet des visas. Brice Hortefeux va réunir les préfets, qui n'ont pas atteint leurs objectifs en matière d'expulsion, pour les mettre en demeure. Les consuls de France dans les pays d'émigration seront de la réunion pour s'imprégner des nouvelles priorités de la France dans l'attribution de visas. Ainsi, il leur sera exigé d'être “plus vigilant” dans la délivrance des visas de court séjour qui, selon le ministre lui-même, “ne doivent pas être des passeports pour la clandestinité”. Les Algériens doivent donc s'attendre à de nouveaux durcissements en matière de visas français délivrés déjà au compte-gouttes et selon un vrai parcours de combattant. La France va ensuite prêcher son mode opératoire au sein de ses voisins. M. Hortefeux compte vendre ses mesures à ses homologues dont les pays sont étiquetés de terres d'accueil. Le ministre français a annoncé son dessein de réunir, en janvier 2010, les ministres en charge de l'immigration des cinq pays qui concentrent 80% des flux migratoires vers l'Europe (Allemagne, Royaume-Uni, Espagne et Italie, en plus de la France), mais aussi ceux de Malte, de la Grèce et de Chypre, qui constituent, selon Hortefeux, les principales portes à l'immigration illégale en Europe. Le plus proche parmi les proches de Nicolas Sarkozy veut tout simplement ériger un mur entre les deux rives de la Méditerranée. Quand Hortefeux clame que “l'Europe n'est pas une passoire”, sont expressément visés les ressortissants du Maghreb et ceux de l'Afrique subsaharienne. La France a signé pourtant une quinzaine d'accords avec des pays sources d'immigration, appartenant à cette région mais, apparemment, cela n'a pas fonctionné dans le sens voulu par les Français puisque Hortefeux a avoué que pour mieux maîtriser l'immigration, son pays doit mieux contrôler ses frontières. Faute d'entraîner les régimes de ces pays dans sa paranoïa anti-immigrés, le ministre français va prêcher chez ses homologues le principe sarkozien : “La France a le droit de choisir qui elle veut et qui elle peut accueillir sur son territoire”. Enfin, pour exaucer l'objectif de faire baisser l'immigration illégale, un projet de loi qui prévoit d'étendre la durée de rétention administrative de 30 à 45 jours, fait l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale française. “L'immigration doit baisser et elle baissera… Un étranger en situation irrégulière a vocation d'être reconduit dans son pays d'origine”, a averti Hortefeux. Dans ce chapitre, près de 106 000 immigrés clandestins ont été expulsés depuis 2007. Un total de 25 000 étrangers a été reconduit de janvier à fin octobre dernier. La France compte, actuellement, environ 6,7 millions d'immigrés, soit 11% de sa population (étude de l'Institut national des études démographiques). Le nombre d'Algériens qui vivent en France est estimé à plus de trois millions. Il est utile de rappeler que la France a déjà été épinglée par l'association Cimade qui a brossé un tableau sombre sur les conditions d'octroi de visas aux Algériens dont la France reste la première destination en Occident. L'enquête, menée par cette ONG, avait critiqué le taux de refus élevé d'octroi de visas aux Algériens. M. Hortefeux devra compter sans les Allemands. Contrairement à la France, l'Allemagne a décidé d'alléger les démarches administratives à certains travailleurs étrangers. Hortefeux aura du mal à convaincre les Allemands. Reste que Berlin marque des points. Sa nouvelle politique de l'immigration est révélatrice de son dynamisme économique, de quoi aiguiser l'ego de l'establishment français. Les nouvelles directives de Nicolas Sarkozy contre l'immigration interviennent alors que les clignotants de son pays ne veulent pas quitter le rouge : marasme économique, déficit budgétaire abyssal, fermeture en cascades de sites de travail, hausse du chômage, baisse du pouvoir d'achat, du niveau scolaire et de la qualité des soins, maintien au bas de l'échelle de la cote de popularité du président de la République, remontée de la droite lepéniste… Pour Sarkozy, pas question de laisser de côté ce thème de l'immigration, en vue de la présidentielle de 2012.