Nos déchets médicaux subissent pratiquement le même sort que nos ordures ménagères. Si au plan de la prise en charge thérapeutique des maladies, de grandes avancées ont été réalisées, au plan de la prévention et de la prise en charge des déchets d'activités de soins, tout reste à faire. En effet, la filière d'élimination des déchets d'activités de soins n'est ni organisée, ni structurée, ni sécurisée dans l'ensemble de nos établissements hospitaliers. Toutes les actions menées jusque-là se sont avérées défaillantes, voire obsolètes. Pourtant, le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière a instruit, en août 2008, les professionnels de la Santé à réorganiser la filière d'élimination de déchets d'activités de soins dans les meilleurs délais. L'instruction du 04/08/2008 a instauré l'obligation de prendre en charge la gestion des déchets d'activités de soins par les établissements de santé. Elle définit le tri, le stockage et le traitement des déchets d'activités de soins, parle des emballages qui doivent être aux normes européennes et insiste sur le fait que le traitement des dasri (déchets d'activités de soins à risques infectieux) doit être écologique. Pour les spécialistes, la filière d'élimination se décline autour d'axes pratiques parfaitement codifiés : le tri à la source qui est obligatoire et permet de séparer les catégories de déchets et de les constituer dans la filière spécifique ; l'entreposage qui doit obéir à des règles précises ; le transport qui doit être adapté au transport des matières dangereuses et leur destruction in situ dans le respect de l'écologie hospitalière et leur élimination ultime. Ce protocole est-t-il réellement respecté ? Force est de constater que ce n'est pas le cas. Pour commencer, le tri à la source reste incorrect. Cela est dû, selon le personnel hospitalier, à la non-conformité des conteneurs de conditionnement. L'indisponibi-lité de sachets spécifiques à ces déchets serait aussi une cause principale de ce mauvais tri à la source, que ce soit dans les salles de prélèvement, au laboratoire, dans la salle de soins ou dans la chambre du malade, où les trois quarts des déchets à risques infectieux sont produits. Et quand ces sachets sont disponibles, c'est le problème de la méconnaissance de l'emballage adapté à la collecte des déchets de soins à risque qui se pose. Pourtant, les normes de tri des déchets sont, aujourd'hui, connues. Emballage de couleur rouge pour les DRCT (déchets à risques chimique et toxique), emballage de couleur verte pour les organes et pièces anatomiques reconnaissables, emballage noir pour les déchets assimilés à des ordures ménagères (Daom), emballage transparent pour les déchets radioactifs. Concernant le stockage, le constat n'est pas meilleur. Même si la réglementation en vigueur recommande l'aménagement au sein de chaque structure d'espaces de stockage protégés, en vue d'éviter toute manipulation accidentelle pouvant engendrer des maladies, le stockage des déchets de soins se fait, anarchiquement, dans les salles de soins, dans les sanitaires ou sous l'escalier. On peut trouver des sacs non fermés, éventrés, de vieux seaux ou des cartons. Pour ce qui est des zones de regroupement extérieures aux services, la majorité des établissements hospitaliers déposent les sacs de déchets à même le sol. Concernant le mode de transport de ces déchets, il ne diffère guère de celui appliqué aux déchets ménagers. Les sacs de déchets sont traînés à la main, transportés dans des chariots de fortune, des tracteurs avec remorque, sans qu'aucune précaution soit prise pour la protection du personnel. Pour ce qui est de l'étape finale qui représente l'élimination des déchets, le constat est ahurissant. En effet, le matériel d'incinération installé dans l'enceinte même des hôpitaux est en contradiction même avec la loi. La plupart ne sont pas en état de fonctionnement. Ceux qui fonctionnent sont constitués de brûleurs obsolètes, polluants et dangereux pour les malades hospitalisés, pour le personnel de santé qui exerce dans l'établissement, pour les visiteurs, les riverains et pour l'environnement urbain. Il faut savoir que les incinérateurs à l'intérieur de l'hôpital sont bannis dans la majorité des pays dans le monde. Ils ont été externalisés et unis en activités dans le cadre d'usine d'incinération. Le secteur privé n'a, pour sa part, pas encore pris en compte cet aspect lié aux déchets d'activités de soins, et leur élimination se fait sans respect de l'écologie hospitalière de l'environnement et sans respect des normes imposées par la réglementation en vigueur. Censés sous-traiter avec des hôpitaux, de nombreux établissements privés, au mépris des lois et sans être inquiétés, se contentent de rejeter leurs déchets dans les décharges publiques. On estime que 32 millions de tonnes de déchets hospitaliers sont annuellement générés par les hôpitaux et cliniques. Ces déchets contiennent des éléments chimiques néfastes pour l'environnement et dangereux pour la santé du citoyen qui peut de ce fait contracter nombre de maladies. La menace qui plane sur la Santé publique nécessite une intervention urgente car les moyens dont dispose l'Algérie pour faire face à ce problème sont faibles. Il n'existe, en effet, que 348 incinérateurs de déchets hospitaliers et seulement 1 500 spécialistes dans le domaine.