Barzani inquiète l'Irak en demandant l'autodétermination du Kurdistan. Les réactions s'enchaînent dans le pays après la revendication d'un droit à l'autodétermination lancée par le président de la région autonome du Kurdistan irakien, Massoud Barzani. Le chef de file du PDK a formulé cette revendication, le 11 décembre 2010, lors du congrès du Parti démocratique du Kurdistan. Chiites et sunnites craignent désormais une scission du pays. Consternation à Bagdad. Le sage médiateur kurde salué auparavant pour ses actions en faveur du dialogue dans la résolution de la crise politique irakienne est aujourd'hui accusé de traîtrise. Et si n'était qu'une démonstration de force de Barzani la veille de la formation du gouvernement central ? À quelques jours de la fin du délai légal des tractations, en vue de la formation du prochain cabinet Al Maliki, la menace de Barzani est également perçue comme une stratégie afin de faire monter les enchères. En coulisses, on parle déjà de la réattribution du ministère des Affaires étrangères à l'Alliance kurde. Barzani voudrait avoir également dans son escarcelle le ministère du Pétrole, qui reste l'objet de toutes les convoitises. Reste que le président de la région autonome du Kurdistan irakien, Massoud Barzani, a revendiqué lors du congrès de son parti, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK), le droit à l'autodétermination pour les Kurdes, ce qui pourrait être un prélude à une scission de l'Irak. C'est la première fois que le dirigeant kurde propose en des termes aussi clairs à son parti de se prononcer sur une possible indépendance du Kurdistan irakien, qui bénéficie depuis une vingtaine d'années d'une large autonomie vis-à-vis du gouvernement central de Bagdad. Et cette annonce a été faite devant les plus hautes autorités de l'Irak. Le congrès du PDK s'était ouvert en présence notamment du président irakien Jalal Talabani, chef de l'autre parti kurde, l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), du Premier ministre désigné Nouri al Maliki et d'Iyad Allawi, chef de file d'Iraqiya, la liste laïque soutenue par une majorité de sunnites, qui a obtenu le plus de sièges au Parlement de Bagdad lors des dernières législatives et qui a dû se contenter de la présidence du Parlement. Constitutionnellement, ce devait Iyad Allawi qui aurait dû être nommé Premier ministre mais Al Malika s'est arrangé pour garder son poste. Comment, le secret n'a pas encore été éventé. Les 1 300 membres du PDK seront appelés à voter sur la question de l'autodétermination, a précisé une source au sein du parti durant la tenue de son 13éme congrès, sans préciser quand ce scrutin aurait lieu. Le PDK constitue la principale force politique du Kurdistan, et la coalition qu'il forme avec l'UPK est majoritaire au Parlement régional depuis les élections de 2009. Le PDK est l'une des composantes de la coalition au pouvoir en Irak. Et son chef Barzani a jouer un rôle crucial pour dénouer la crise politique dans laquelle l'Irak s'est enfoncé après les élections du 7 mars. C'est en effet lui qui est parvenu à arracher le mois dernier aux dirigeants des principales formations irakiennes l'accord de partage de pouvoir qui a ouvert la voie à l'attribution des plus hautes charges du pays, après huit mois d'impasse. Maliki doit former incessamment son prochain gouvernement dont la composition rendra compte du marchandage qui lui a permis de rempiler en dépit des résultats des législatives. De fait, après une première forme d'autonomie obtenue dans les années 1970, le Kurdistan, qui rassemble trois provinces du nord de l'Irak (Erbil, Dohouk et Souleimaniyeh), s'est véritablement émancipé de la tutelle de Bagdad après la première guerre du Golfe, en 1991. Mais le Kurdistan a ensuite été divisé par la guerre impitoyable que se sont livrée l'UPK et le PDK de fin 1994 à 1998, qui a fait 3 000 morts. Les deux partis se sont réconciliés sous les auspices de Washington au point de s'allier pour les élections de 2005, qui ont porté Massoud Barzani à la présidence de la région et Talabani à la tête de l'Irak. Le Kurdistan possède depuis la seconde guerre du Golfe (2001-2005), son propre Parlement et dispose de prérogatives étendues dans tous les domaines, à l'exception de la monnaie, des affaires étrangères et de la défense. Cette autonomie s'est cependant maintes fois heurtée ces dernières années à l'autorité du gouvernement central, notamment sur la question des contrats pétroliers qu'il a signés avec des compagnies étrangères, et que Bagdad ne reconnaît pas. En outre, les Kurdes revendiquent de vastes portions de territoires hors de leurs frontières administratives actuelles, principalement dans la province riche en pétrole de Kirkouk, mais aussi dans celles de Ninive (nord), Salaheddine et Diyala (centre). “Quand Kirkouk reviendra dans le giron de la région, nous en ferons un exemple de coexistence (…) et de gouvernance partagée, mais nous ne négocierons pas son identité”, a averti Barzani devant le congrès de son parti à la face du président de l'Irak et de son Premier ministre. Fils de Moustafa Barzani, dirigeant de l'éphémère république kurde proclamée en 1946 à Mahabad, en Iran, Massoud Barzani dirige le PDK d'une main de fer depuis 1979.