Les jours d'Abdelaziz Belkhadem sont-ils comptés, et la session du Comité central, prévue jeudi prochain, serait-elle la dernière qu'il préside ? À la contestation qui gagne les bases du parti vient s'ajouter le doute qui s'installe chez les membres du bureau politique et les ministres du parti. Ces derniers, lors de la dernière réunion du BP, tenue mercredi dernier, au siège du parti, auraient exercé une forte pression sur Belkhadem afin de connaître la position du président de la République, président d'honneur du FLN, face à la crise qui secoue le parti. La réponse de Belkhadem — “le Président a d'autres soucis et la situation du FLN ne l'intéresse pas” —, n'a pas convaincu les cadres du parti qui commencent vraiment à s'inquiéter, eux qui veulent toujours connaître la direction du vent. D'ailleurs, beaucoup de cadres ont manqué à l'appel mercredi dernier, histoire de ne pas trop se compromettre, en attendant de voir plus clair. Les cadres du parti auraient également demandé à connaître la position des deux frères du Président, Saïd et Nacer. Le premier que l'on soupçonne de vouloir succéder à son frère aîné, et le second qui n'est autre que le chef de cabinet d'un des chefs de file des frondeurs, El-Hadi Khaldi. On le voit bien : les cadres du parti sont désemparés et soupçonnent que quelque chose se trame à leur insu. Et ce n'est pas la déclaration controversée de Belayat, affirmant que le futur président sortirait des rangs du FLN, qui rassurerait les dinosaures du vieux parti. Les cadres, qui sont restés dans les rangs, ne sont pas prêts à signer un chèque en blanc à Belkhadem, surtout que tous les indices plaident en faveur des néo-redresseurs. Ces derniers multiplient leur travail sur le terrain et parviennent, chaque jour, à rallier à leur cause de nouveaux militants. Ce week-end, les néo-redresseurs ont frappé un grand coup en ralliant un millier de militants de la très symbolique mouhafadha de Tlemcen où une cinquantaine de kasmas ont dénoncé publiquement la gestion de Belkhadem et affirmé leur soutien aux frondeurs. Même si Belkhadem avait évité, mercredi dernier, d'évoquer les frondeurs, se contentant comme d'habitude de minimiser l'étendue de la crise (quatre à cinq kasmas, selon lui), il n'en demeure pas moins que la tenue de la session ordinaire du Comité central, en pareilles circonstances pourrait ressembler, pour lui, à un chant de cygne. Il faudrait vraiment être naïf politiquement pour croire que le président Bouteflika s'exprime sur la crise du FLN. Ce n'est pas son genre. Il ne l'a jamais fait auparavant, y compris lorsque Benflis avait le contrôle du FLN et se présentait contre lui à l'élection présidentielle. Ceux qui connaissent l'homme savent qu'il a horreur qu'on lui dicte sa conduite. Alors, on imagine mal un Belkhadem aller voir le président pour lui demander de se situer pour tel ou tel clan au sein du parti. En fait, le comportement des cadres du parti est beaucoup plus une expression de leur gêne, un signal à Belkhadem qui signifie qu'en cas de pépin, il coulerait tout seul. Beaucoup, parmi eux, n'ont pas oublié l'épisode Benflis où certains avaient reçu des assurances de la part de ce dernier quant à ses supposés soutiens. Ils ont dû, par la suite, ramer et se plier en quatre pour faire admettre qu'ils ont été induits en erreur. À une année des élections législatives, le FLN ne s'est jamais aussi mal porté et tout indique qu'il risque gros lors de ces joutes électorales et qu'il pourrait, de ce fait, être écarté dans le choix du futur présidentiable. Un tournant dans l'histoire de l'Algérie.