Un nouveau cas de décès, suite à un malaise sur le terrain, vient d'être rapporté par la presse. Cet accident ayant touché un jeune footballeur évoluant à l'ouest du pays est malheureusement le énième d'une série qui aurait, sans aucun doute, été allégée si un suivi médical spécialisé et rigoureux avait été respecté au niveau national. L'Algérie qui avait pris une avance confortable, au plan médico-sportif, par rapport au reste des pays africains et même de bon nombre de nations européennes, se contente aujourd'hui de faire une comptabilité macabre des accidents mortels touchant des sportifs en pleine activité. Le sportif en général, et le football en particulier, subissent aujourd'hui des charges de travail de plus en plus élevées, dictées par la recherche de résultats compétitifs générateurs de gloire et autres avantages matériels. Il est bien évident que ces charges additionnelles constituent une relative agression contre l'organisme humain, dont les conséquences peuvent être graves, particulièrement lorsqu'une certaine fragilité touche un organe vital. C'est ainsi que plusieurs cas de mort subite ont été relevés chez des pratiquants de sports intenses tels que le football, décès relatifs généralement à l'existence d'anomalies cardiaques ou vasculaires (anévrysme). Les moyens d'explorations médicales dont disposent aujourd'hui les médecins spécialistes à travers le monde permettent souvent de détecter ces anomalies et de prévenir les accidents, en déclarant le sujet inapte à la pratique de sport compétitif, ou en lui assurant les soins et le suivi médicaux nécessaires. L'exemple du Nigérian Kanu est, à ce titre, très édifiant : la malformation cardiaque a été détectée puis opérée, pour lui permettre de reprendre ses activités sportives, sous contrôle médical régulier. Les rares cas de décès relevés, aujourd'hui, sur les terrains internationaux, témoignent bien de l'apport de la médecine du sport, dont les moyens d'investigation assurent le maximum de sécurité aux pratiquants. En Algérie, malheureusement, l'évolution de la couverture médicale spécialisée a subi l'effet inverse, les sportifs ayant bénéficié d'un meilleur suivi médical dans les années 1970 et 1980 qu'actuellement. L'ouverture de la clinique médico-sportive au début des années 1980 laissait entrevoir un développement des activités médicales spécialisées sur l'ensemble du territoire national, à travers l'implantation de centres régionaux, puis de structures médico-sportives de wilaya. La réorientation des missions de l'ex-Centre national de médecine du sport (CNMS), et surtout le désengagement total du ministère de la Jeunesse et des Sports par rapport à cette dernière structure et au projet de développement de la médecine du sport ont poussé notre pays à être à la traîne du suivi médico-sportif, après avoir été largement en avance, au moins au niveau continental. Le service de médecine du sport et de rééducation fonctionnelle de l'EHS Docteur Maouche (ex-CMS), seule structure médicale spécialisée existant au niveau national, continue, tant bien que mal, à prendre en charge les athlètes qui y sont adressés, avec cependant des moyens qui ne répondent plus aux exigences de la performance sportive. L'activité de médecine du sport qui n'est maintenue, dans cette structure, que grâce à la bonne volonté des responsables du ministère de la Santé et de l'administration de l'hôpital, risque à terme de disparaître complètement par le flux de malades non sportifs qui sont orientés vers l'ensemble des services de l'établissement. À ce train, on devine aisément que nos athlètes vont vers des dangers de plus en plus grands, le rapport charge de travail physique/suivi médical étant largement déséquilibré. Il est malheureux de constater qu'au moment où des sommes d'argent colossales sont dépensées sur des projets parfois hasardeux, les responsables du mouvement sportif ne pensent pas à protéger la vie et la santé des athlètes. Les médecins spécialistes existent, d'autres peuvent être formés, les structures existent (au niveau de l'ex-CNMS, dans les OPOW, dans les Instituts de formation, etc.) ; il suffirait de prendre la décision d'équiper ces différentes structures et de procéder à la réorganisation de l'activité médico-sportive pour assurer une couverture médicale optimale, au niveau national. On aura ainsi respecté le principe de l'obligation de moyens ; dans le cas contraire, il s'agirait d'une non-assistance à sportifs en danger, et les responsables devront en répondre au moins devant leur conscience. R. H. (*) Chef de service de médecine du sport et rééducation fonctionnelle EHS Docteur Maouche (ex-Centre national de médecine du sport)