Les affrontements ont repris entre policiers antiémeutes et jeunes manifestants, juste au moment de la tombée de la nuit. Des tirs de gaz lacrymogènes fusaient de partout, devant l'obstination des jeunes de ne pas se disperser de l'avenue Habib-Bourguiba, devenue symbole de la contestation et lieu de convergence de tous les Tunisiens qui ont envie de s'exprimer, notamment depuis le démantèlement, vendredi matin, du camp de “la caravane de la liberté” installé dans la Casbah, en face des bureaux du Premier ministre. La journée de samedi a été pourtant calme, avec des processions ininterrompues de groupes de jeunes qui refusent toujours de mettre un terme à leur mouvement. Les uns protestent contre la présence d'anciennes figures du régime Ben Ali dans le nouveau gouvernement provisoire, alors que les autres critiquent l'attitude de la police qui, une fois l'armée retirée, est revenue à la charge pour réprimer les manifestations pacifiques.“Non à un régime policier bis” brandissaient les manifestants. Des islamistes se sont glissés dans les processions pour entonner leur slogan préféré “la thakafa la doustour, kalla Allah kalla arrassoul” (Ni culture, ni constitution, parole de Dieu, parole du Prophète) devant le regard médusé des passants. Les heurts se sont poursuivis durant une bonne partie de la soirée. Les policiers, en très grand nombre, poursuivaient les manifestants dans les ruelles. L'avenue Bourguiba a été fermée à la circulation automobile durant une bonne partie de la journée. Sa réouverture a coïncidé avec la reprise des heurts, créant un climat de tension indescriptible.