L'annonce faite jeudi dernier par le premier magistrat du pays concernant la levée de l'état d'urgence qui “interviendra dans un très proche avenir”, n'a rien changé à la décision prise par la Coordination nationale pour le changement et la démocratie qui a décidé d'aller vers une manifestation le 12 février prochain. S'exprimant sur le sujet, la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH), initiatrice en grande partie de cette marche, s'est interrogée sur la nature de cette annonce : “Cette déclaration constitue-t-elle une réelle volonté d'aller vers un changement, ou s'agit-il d'une manœuvre destinée à gagner du temps et tromper l'opinion internationale ?”, se demande Me Mustapha Bouchachi, président de la ligue. Et d'expliquer la finalité de la création de la coordination : “Notre but n'est pas de lever l'état d'urgence mais d'arriver à un vrai changement de régime et d'instaurer une réelle démocratie dans le pays”, a-t-il dit. Selon lui, la levée de l'état d'urgence seule “ne changera en rien à la nature du régime autoritaire en Algérie”. Commentant le maintien de l'interdiction des marches à Alger, M. Bouchachi se dit ne pas comprendre cette exclusion. Il estime que la capitale appartient à tous les Algériens qui ont le droit de s'exprimer. “Je ne comprends pas pourquoi il est interdit de manifester à Alger. Alger, elle, ne peut faire exception. Bien au contraire, c'est à la capitale que les revendications peuvent être entendues”, a-t-il précisé. Même son de cloche du côté des syndicats et associations qui se disent sceptiques. Ils estiment que les déclarations du chef de l'Etat ne changent en rien à la décision de la coordination. “Nous avons l'habitude des promesses du gouvernement… et rien n'est encore officiel. Le chef de l'Etat a instruit le gouvernement pour étudier la question, donc, cela peut aller jusqu'à 2020”, a déclaré M. Ider Achour, porte-parole du CLA, membre de la coordination. Il fait remarquer qu'à travers cette annonce, “le gouvernement souhaite anticiper afin de délégitimer la revendication de la coordination”. Le CLA est revenu sur la déclaration du chef de l'Etat concernant son appel aux médias à plus d'ouverture. “Tant qu'il n'y aura pas de médias lourds privés, il n'y aura pas d'ouverture. C'est une manière de contourner la question”, a-t-il commenté. Le secrétaire général du Snapap a relevé, pour sa part, le discours “contradictoire” du gouvernement. “Mercredi, le vice-Premier ministre a déclaré que l'état d'urgence ne serait pas levé et le lendemain le chef de l'Etat a annoncé l'inverse et dans un avenir proche…”, a-t-il signalé. Selon lui, cette annonce est une tentative pour entraver l'initiative de la coordination pour le changement démocratique. “Moubarak avait également promis, il y a quatre ans, de lever l'état d'urgence et de le remplacer par des textes pour la lutte antiterroriste…”, a-t-il rappelé. Notant que la commission technique de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie se réunira aujourd'hui. Pour le moment, la marche du 12 février est maintenue mais il est question, également, de discuter de la dernière déclaration faite par le chef de l'Etat lors de cette rencontre.