Le groupe “terroriste” qui serait derrière des faux barrages et des kidnappings contre paiement d'une rançon dans la région de Kabylie, plus précisément à Aghribs, est finalement tombé. Il s'agit en fait de malfaiteurs armés en tenues militaires et afghanes qui se faisaient passer pour un groupe terroriste du GSPC. Ils seraient derrière sept actes criminels en moins d'une année, dont l'assassinat d'un entrepreneur, l'enlèvement de son cousin à la forêt de Bouhlalou d'Aghribs et l'attaque qui a ciblé le siège du commis-sariat de Fréha. Une rançon versée pour la libération d'une personne enlevée a servi à l'achat d'un lot d'armement. L'enquête des services de la gendarmerie a révélé aussi l'itinéraire de l'acheminement des armes de Tamanrasset à Tizi Ouzou. Un dangereux groupe de malfaiteurs armés qui activait sous le couvert des groupes terroristes du GSPC en Kabylie a été démantelé par les services de la Gendarmerie nationale (GN) fin janvier de l'année en cours après plusieurs mois d'investigations approfondies menées par le Service central des investigations criminelles du commandement de la GN en coordination avec les groupements des wilayas de Béjaïa, Tizi Ouzou et Biskra. Quatre armes de guerre ont été récupérées lors de cette opération. Ce groupe criminel ciblait les entrepreneurs et les riches commerçants dans des faux barrages. Quand les fonds extorqués et les rançons servent à l'achat d'armes Selon des informations fournies par le commandement de la GN, le premier acte criminel remonte au mois de mars de l'année passée, vers 15h, suite à l'extorsion d'une somme de 4 millions de DA sous la menace d'un pistolet, en fait en plastique, dans un faux barrage tendu au niveau de la RN12 au chauffeur d'une camionnette de distribution de boissons alcoolisées. L'enquête a révélé la complicité du convoyeur de la camionnette qui n'était autre qu'un membre de ce réseau. L'argent délesté a servi à l'achat d'un lot d'armes composé de deux PM/AK et de deux PA de calibre 7.65. Ces armes ont été achetées auprès d'un trafiquant d'armes au sud du pays par l'intermédiaire d'une personne détenue au niveau de la prison d'El-Harrach, avec le chef de la bande, pour association de malfaiteurs, faux et usage de faux, vol qualifié et détention illégale d'arme. L'opération d'achat, selon notre source, s'est effectuée en deux temps à raison d'un PA et d'un PM/AK pour chaque transaction d'une valeur de 300 000 DA et payées respectivement avec les fonds extorqués lors de l'agression du chauffeur de la camionnette et aussi les fonds perçus en contrepartie de la libération d'une personne enlevée le 4 juillet 2010 contre une rançon de 7 millions de DA. Selon notre source, les enquêteurs ont pu récupérer les armes à Tizi Ouzou et à Béjaïa. Les investigations entreprises ont fait ressortir que les déplacements des criminels ainsi que les passages des armes achetées ont été effectués à bord de deux véhicules touristiques loués auprès des agences de location de voitures, à Dergana, à l'est de la capitale, et à Fréha (Tizi Ouzou). Les criminels dissimulaient les armes à l'intérieur de la garniture de la portière droite du siège du passager afin d'éviter la détection des appareils Fennec (spécialisé dans la détection des armes) et en empruntant l'itinéraire de Tizi Ouzou-Boumerdès-Alger-Médéa-Blida-Djelfa-Laghouat-Ghardaïa-El Menea-Aïn Salah et Tamanrasset, au niveau de la frontière algérienne avec le Niger. Les faux terroristes se déplaçaient à bord de véhicules loués Les investigations ont également révélé que ce réseau criminel a adopté les méthodes des groupes terroristes à travers le port de tenues vestimentaires afghanes ainsi que le déploiement de faux barrages à différentes heures de la journée. Mais celui-ci a dû changer de secteur d'activité après le resserrement de l'étau sécuritaire dans la wilaya de Tizi Ouzou, procédant à l'usage abusif d'armes à feu pour terrifier ses victimes. L'expertise balistique de l'Institut national de criminalistique et de criminologie de la GN, effectuée sur les douilles récupérées dans les lieux du crime, a révélé qu'elles ont été tirées par les deux PM/AK utilisés dans les agressions enregistrées à Tizi Ouzou le 14 novembre 2010 et les 10, 16 et 31 décembre 2010, ainsi que celle de Biskra le 6 janvier 2011. Les numéros de série de ces armes qui ont été limés ont été techniquement révélés par l'expertise effectuée au niveau de l'Institut national où il a été établi que les deux PM/AK de fabrication chinoise n'étaient pas répertoriés et donc inconnus des services de sécurité, et que le canon du PA Beretta fabriqué initialement pour tirer des cartouches à blanc a été remplacé par un autre de calibre 7.65. Sept personnes membres du réseau ont été finalement arrêtées, alors que trois autres identifiées demeurent activement recherchées. Le réseau serait derrière plusieurs actes criminels, dont celui enregistré le 14 novembre par trois individus armés de PM/AK en tenues militaires et afghanes qui ont dressé un faux barrage sur la RN71 au lieu-dit forêt de Bouhlalou d'Aghribs, wilaya de Tizi Ouzou, au cours duquel ils ont mobilisé un véhicule avec deux personnes à bord et enlevé l'un des deux occupants alors que le second, qui a pris la fuite et avait fait l'objet de tirs de la part de ces individus, succomba, trois jours plus tard, à ses blessures. Il s'agit de l'entrepreneur Hand Slimana, alors que la personne enlevée, qui n'est autre que son cousin Omar, a été libérée une semaine plus tard par ses ravisseurs, et ce, sans percevoir la rançon qu'ils avaient pourtant exigée devant la forte mobilisation de la population. Une rançon de 7 milliards pour acheter des armes à Tamanrasset Une autre affaire, celle enregistrée au village Tala Athmane, commune de Tizi Ouzou. Vers 22h, deux citoyens qui allaient faire des achats ont été dépossédés de leur véhicule par les membres de ce réseau en tenue militaire et armés d'un PM/AK. Ils se faisaient passer, comme toujours, pour des terroristes. Le commerçant, qui s'est interposé, a été touché au thorax de deux balles, mais il a pu être sauvé. Les membres de ce réseau criminel voulant se passer pour des terroristes seraient aussi derrière les tirs de rafale le 16 décembre dernier en direction de la façade de la Sûreté urbaine de Fréha par trois individus armés depuis un véhicule. Trois membres de ce réseau criminel, selon l'enquête, seraient derrière l'attaque qui a ciblé deux citoyens à Aghribs à Mizrana, au lieu-dit Netlata. Les criminels ont accosté les deux victimes, à bord d'un véhicule, les sommant de s'arrêter en tirant des coups de feu en l'air. Le véhicule a été retrouvé le lendemain abandonné sur la plage Tamda- Ouguemoun, commune d'Iflissen. Tout comme ils seraient derrière l'agression d'un chauffeur qui était à bord de son camion stationné à proximité d'un relais routier, sur la RN83 reliant les wilayas de Biskra et de Khenchela. Selon les résultats de l'enquête, il a été agressé par un individu armé d'un PM/AK qui l'a contraint à prendre la route avant qu'il ne tombe dans un faux barrage, après avoir roulé deux kilomètres, dressé par deux autres individus qui étaient à bord d'un véhicule immatriculé à Alger. Ils l'ont dépossédé d'une somme de 30 millions de centimes après l'avoir blessé par balle à l'épaule et au cou. De même que les enquêteurs de la GN de la wilaya de Béjaïa ont interpellé, le 17 janvier dernier, une personne sur la RN26 menant vers la commune de Chellata en possession d'un PA de calibre 7.65 de fabrication française et d'une somme de 32 millions de centimes dissimulée dans son véhicule. Il s'est avéré que le véhicule en question a été volé dans la localité de Bouhamza, dans la wilaya de Béjaïa, et a fait l'objet d'une plainte déposée la veille à la brigade de la GN de Beni Maouche. Ces criminels auraient profité de la situation sécuritaire instable de la région pour commettre leurs crimes, avec la stratégie même des terroristes. Cette affaire reflète encore la connexion entre le banditisme et le terrorisme.