En tapant de leur matraque sur le bouclier, les policiers provoquaient un brouhaha infernal, visiblement destiné à effrayer les manifestants qui se mettaient alors à courir dans tous les sens. La politique du “kazoul” (bâton) a porté ses fruits. Contrairement à la semaine dernière, le dispositif était essentiellement concentré sur la place du 1er- Mai, qui est devenue bleue de policiers, pour l'occasion. De la place du 1er-Mai à Belouizdad, c'est une armada en bleu qui s'est déployée. Selon une source policière, neuf unités de police étaient ainsi mobilisées pour réprimer la marche de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD). La même source précise que chaque unité compte entre 90 et 120 individus. Ali Yahia Abdenour avance, pour sa part, le chiffre de 40 000 policiers qui encerclaient Alger. Contrairement à la première manifestation, la police a changé de tactique en optant, cette fois-ci, pour la fragmentation du rassemblement. Cette méthode, tout en déstabilisant les manifestants, rend surtout difficile leur quantification. Des policiers en civil étaient, également, sur les lieux. Certains se faisaient passer pour des manifestants et d'autres portaient des appareils photos ou des caméras pour apporter leur appui. D'autres encore étaient au volant des voitures qui se faufilaient entre les manifestants, en se faisant passer pour des citoyens. Dès qu'un groupe de protestataires tentait une incursion, il était aussitôt chargé par un assaut policier qui le repoussait vers les ruelles adjacentes à la place de la Concorde. Un seul mot d'ordre dans la bouche des policiers : “circulez !” Une injonction accompagnée souvent de brutalité quand les manifestants tentaient d'opposer une résistance. Les assauts de la police contre les manifestants se sont parfois soldés par des dérapages. Ainsi, lors d'un accrochage verbal entre les pro-manifestants et les opposants, un policier assènera un violent coup de pied à une jeune manifestante qui s'est écroulée parterre en se tordant de douleur. Malgré “l'état de siège” de l'avenue du 1er-Mai, la circulation était “normale”. Les voitures et les bus circulaient normalement. Les bus publics de la place du 1er-Mai desservaient toutes les destinations. Le va-et-vient des véhicules aidait les policiers dans le fractionnement du rassemblement. Le dispositif comptait, aussi, plus d'une centaine de véhicules, entre chasse-neiges, blindés, voitures de police, et même des véhicules banalisés étaient visibles dans toutes les artères d'Alger. L'hélicoptère n'était pas en reste du dispositif où, durant toute la journée, il survolait la capitale.