Alain Juppé hérite d'une ruine, un chantier à refaire sans en avoir le temps nécessaire. D'où cette précipitation à condamner, avant les autres, le guide libyen afin de faire oublier les ratages sur la Tunisie et l'Egypte. MAM est sortie par la petite porte laissant derrière elle une image des plus ternies de la France et de sa diplomatie. C'est le ministre de la Défense, M. Juppé, qui est appelé à jouer au sauveur de cette diplomatie “ruinée” par l'incompétence d'une Alliot-Marie et la mainmise du président Sarkozy sur les affaires étrangères ne concédant que quelques parcelles à sa ministre dont la réactivité aux évènements de Tunisie a été lente et maladroite. Maladresses qui ont profité aux Etats-unis et qui ont posté un diplomate actif spécialement mobilisé pour scruter le monde arabe en ébullition. Complexe du colonisateur qui transparaît dans le comportement de nombreux responsables français ou fausse analyse de la situation, l'attitude du Quai d'Orsay a fini par subir l'effet des El-Bouzidi du Sud. Alain Juppé hérite d'une ruine, un chantier à refaire sans en avoir le temps nécessaire. D'où cette précipitation à condamner, avant les autres, le guide libyen afin de faire oublier les ratages sur la Tunisie et l'Egypte. Que pourra faire Juppé ? La question vaut d'être posée pour deux raisons importantes. Il y a d'une part le poids de Nicolas Sarkozy sur la diplomatie française et sa tendance à vouloir tout mettre sous sa coupe. Partant de ce constat, il n'est pas sûr que Sarkozy accorde à son ministre une marge de manœuvre plus grande ou encore quelque autonomie. L'autre raison a trait à la personnalité de Juppé et au volet au parfum françafrique et tutélaire de son CV. Au même poste dans les années 1990 alors que le terrorisme était à son paroxysme, le chef de la diplomatie française n'a pas hésité à appuyer un embargo contre l'Algérie. Les islamistes feront de l'Hexagone une sorte de base arrière de soutien financier et logistique aux maquis islamistes en Algérie. Parti d'une analyse sommaire avec des conclusions hâtives, la France officielle — gauche et droite — a prédit la prise du pouvoir par les islamistes d'où ces prises de position inattendues. Que fera alors Juppé pour “réhabiliter” l'image de la France ? Pour qu'elle rattrape le terrain perdu ? Pour reconquérir ses espaces d'influence ? Dure équation, la conjoncture ne lui étant pas favorable.