Pour sauver l'établissement, il faut injecter 100 millions de dinars. Le sort de la banque privée AIB (Algerian international bank), placée sous administration provisoire depuis le 13 janvier 2002, commence à se préciser. Cette banque d'affaires, au capital de 100 millions de dinars, semble sortir de la zone rouge, après avoir frôlé la cessation de paiement, du fait d'une gestion désastreuse dans les fonctions essentielles de cet établissement, note-t-on auprès de sources proches de ce dossier. Plus de 155 millions de dinars de crédits octroyés et ressortis comme compromis, c'est-à-dire quasiment irrécouvrables, seuls 42 millions de dinars ont été récupérés. Des crédits octroyés sans aucune forme de garantie. Le rapport établi par l'inspection générale de la Banque d'Algérie, au mois d'avril 2002, mentionnait qu'au 31 décembre 2001, les engagements de l'AIB sur la clientèle s'élevaient à 612 millions de dinars répartis entre 64 clients. La mission d'inspection de la Banque d'Algérie indique que seuls 6 dossiers “ont fait l'objet d'une étude de risque, le reste de la clientèle a bénéficié de crédits sur la base d'un simple dossier de caisse dont les éléments ne permettent que l'identification de la relation et ne permettent pas d'apprécier les risques encourus”. Plus loin, le rapport d'inspection relève qu'en matière de concentration des risques, 9 clients sont en dépassement des 25% des fonds propres nets de l'établissement. Autre constat dans l'irrégularité des formes soulignée par l'inspection, certains actionnaires de l'AIB, qui étaient en même temps associés dans plusieurs sociétés domiciliées à la même banque, faisaient bénéficier ces dernières (leurs sociétés) de crédits faramineux atteignant jusqu'à 45 millions de dinars sans “autorisation préalable du conseil d'administration”. Alors que son statut ne le lui permettait pas au regard de la loi sur la monnaie et le crédit, l'AIB, note le rapport, s'adonnait à des opérations de collecte de dépôts publics par l'ouverture de comptes au profit de la clientèle avec remise de chéquiers. Ce qui constitue, aux yeux de la réglementation, une infraction sérieuse. L'ANCIEN PDG REVOQUE Le même rapport de la mission d'inspection conclut : “Une gestion exclusive, opaque, abusive avec l'utilisation de procédés non conformes à la réglementation... générateurs de dépassements a suscité la saisie des commissaires aux comptes, pour convoquer l'assemblée générale du 12 juin 2001 aux fins de la confirmation de la révocation” de l'ancien PDG de cette banque. Pour leur part, les experts comptables, dans leur analyse de la situation de l'exercice 2001, relèvent plusieurs dysfonctionnements. Absence d'organigramme des fonctions, absence de grille de salaires. Même le président directeur général de cette banque, mentionne le rapport, se voit rémunéré de manière archaïque sans résolution du conseil d'administration ni contrat de travail établi. L'étude de ces experts a fait également ressortir des constats accablants dans le traitement des opérations d'escomptes (crédit sur effets supposant un paiement anticipé). Il est noté “une absence d'étude et d'évaluation du risque liée à des remises à l'escompte dont l'autorisation d'exécuter les opérations émanait d'un seul responsable et non d'un comité”. Autrement dit, le pouvoir de crédit relevait de l'appréciation exclusive d'un seul responsable. Au chapitre des garanties, il est indiqué que l'“examen des importations a mis en évidence l'absence de recueil de garanties en couvertures de ces opérations”. Plus grave encore, en conclusion de cette étude, il est mentionné que les risques de pertes restaient élevés pour l'institution et les financements sont considérés disproportionnés par rapport à la pratique bancaire. DES GARANTIES DOUTEUSES Quant aux crédits à la clientèle, il ressort, au terme ce rapport, que les découverts mobilisables et crédits par signatures étaient pratiquement irréguliers. Les autorisations de crédit qui les matérialisaient mentionnaient des garanties qui “font défaut physiquement”, c'est-à-dire inexistante en réalité. Pis, les autorisations de crédit, souligne le rapport, sont établies parfois a posteriori de l'octroi du crédit, c'est-à-dire une situation inversée où l'on vous donne de l'argent avant d'établir le chèque à votre bénéfice en quelque sorte. Pour illustrer le danger dans lequel était coincé cet établissement, M. Hadj Sadok, administrateur provisoire en charge de l'AIB, nous dira : “C'est un miracle que cette banque ne soit pas morte en mars 2002.” Il faut rappeler que suite à un conflit éclaté entre les actionnaires sur la gestion de la banque, la commission bancaire sollicitée a dépêché l'administrateur qui se dit confiant de l'avenir de l'AIB, car “elle n'est pas en situation de cessation de paiement”. Et d'ajouter : “Conformément aux orientations du gouverneur de la Banque d'Algérie, j'ai tout fait pour redresser la situation et relancer les activités de cette banque. Nous avons fonctionné et réussi à récupérer 42 millions de dinars sur les 155 millions de crédits engagés en 2001”. RECAPITALISATION DE L'AIB : LE FEU VERT DE LAKSACI Selon un document établi par des experts comptables à la fin de juillet 2003, il est urgent de reconstituer le capital social de la banque à hauteur de 77 millions de dinars comme préalable de relance des activités. La situation, selon ces derniers, nécessite un niveau de provision de 100 millions de dinars, soit l'équivalent du capital de la banque, en ce sens où le déficit d'exploitation dégagé jusqu'à juillet 2003 est estimé à 80 millions de dinars, alors que les fonds propres s'élèvent à 23 millions de dinars. Le mois d'août dernier, le gouverneur de la Banque d'Algérie a appelé les actionnaires de l'AIB à rétablir les équilibres financiers de cette banque. En clair, c'est une démarche qui vise à enclencher un processus de sauvetage de cette banque. D'ailleurs, les actionnaires et les membres des nouveaux organes de gestion de l'AIB ont répondu favorablement à cet appel et ont décidé d'injecter des fonds pour la relance de l'AIB. Cela dit, tout semble indiquer que la mission de l'administrateur provisoire tire vers sa fin. Nous reviendrons sur d'autres détails dans notre prochaine édition. A. W. Indemnisation des clients d'El Khalifa Bank Validation de leurs comptes avant fin octobre Les clients déposants d'El Khalifa Bank, en liquidation, sont invités à se rapprocher de leur agence domiciliatrice avant la fin du mois d'octobre pour faire valider la base de calcul de leur indemnisation. Dans un communiqué parvenu, hier, à l'Aps, le liquidateur de la banque a précisé qu'en prévision de la fermeture “impérative” des guichets, les déposants n'ayant pas encore accompli cette formalité sont instamment invités à se présenter à leur agence dans les meilleurs délais. Au-delà de la date du 30 octobre, a-t-il précisé, les déposants qui n'auront pas effectué la validation de leur compte pourront régulariser leur situation dans le cadre du processus de l'apurerment des créances.