Les écoliers de la wilaya de Boumerdès ont repris, hier, le chemin de l'école. Une rentrée très attendue par les élèves après un été éprouvant. Cette année, la rentrée scolaire a été des plus mouvementées sur tous les plans. D'une part, l'on assiste à plusieurs “rentrées”, en raison du tremblement de terre du 21 mai qui a secoué les wilayas d'Alger et Boumerdès. D'autre part, 2003 est l'année de mise en chantier de la réforme du système éducatif. Un certaine cacophonie règne donc autour et dans les écoles de la Boumerdès. 13h. Il y a foule dans la cour de l'école Mohamed-Karchou. Mme Sahel, directrice de l'éducation de la wilaya de Boumerdès a choisi cet endroit pour inaugurer la rentrée scolaire. Pour elle, la rentrée s'est bien déroulée. “Vous avez raté le meilleur ! La rentrée s'est faite sous les coups de tambour et les rires des élèves, contents de retrouver les bancs de l'école ”, lance-telle au journalistes. “Sur les 321 écoles touchées par le tremblement de terre, poursuit-elle avec enthousiasme, 266 ont repris leur fonctionnement hier, et nous attendons la livraison de 55 écoles préfabriquées dans la wilaya.” Un avis optimiste que ne partagent ni les parents d'élèves ni les professeurs qui pensent que la rentrée scolaire est une problématique. Le séisme du 21 mai dernier a, en effet, laissé derrière lui désolation et détresse, affectant le moral des instituteurs et des écoliers. Les parents d'élèves rencontrés sur les lieux ne semblaient pas croire à la normalité de la reprise : “C'est une rentrée folklorique, histoire de dire que tout va bien. Faites un tour à l'intérieur des classes et constatez par vous-mêmes”, lance le père d'un écolier. Et un autre ajoute : “La majorité des parents ont refusé d'envoyer leurs enfants à des kilomètres de leur site de logements.” Nous sommes rentrés dans l'une des classes et nous avons été surpris de voir plusieurs élèves de 1re année, 2e année, 3e année… se partager la même salle. À ce sujet, le directeur de l'établissement nous explique : “C'est une situation momentanée. Ce sont les élèves de l'école Ibn-Khaldoun — comme ils ne sont pas nombreux —, nous les avons mis dans une seule classe, mais dès demain, lorsque leur emploi du temps leur sera donné, tout rentrera dans l'ordre.” Il est à signaler que l'école primaire Ibn-Khaldoun est occupée par les sinistrés qui refusent de partir malgré le début des cours. Nous apprenons également que la veille, les parents d'élèves ont observé un sit-in devant cette école afin de réclamer des sinistrés de libérer les lieux. Du côté de l'école 1er-Novembre, les choses ne semblent pas être différentes. À l'entrée de l'école, Razik, un élève de première année, nous accueillit en pleurant. Sa mère nous prendra à témoin : “Il est traumatisé, il a peur d'entrer dans une bâtisse à plusieurs étages. Les professeurs ont essayé de le rassurer, mais il ne veut rien entendre, il ne cesse de pleurer à chaudes larmes.” Rencontré, le directeur de l'établissement nous explique aussitôt le programme de cette première journée d'étude : “Nous avons donné aux élèves les premières consignes à suivre en cas de secousse, telles que se protéger la tête, se mettre sous les piliers et les cadres des portes, ne pas courir dans les escalier …” Il ajoute que cette école héberge les élèves et les professeurs du primaire Ibn-Khaldoun . “Nous avons cédé neuf classes au personnel de cette école, afin de pouvoir assurer une double vacation, en attendant les écoles préfabriquées.” Les instituteurs de l'école Ibn-Khaldoun s'insurgent contre les sinistrés qui ne veulent pas quitter l'établissement. Les familles, elles, justifient leur position par le grand retard cumulé par les autorités locales dans le domaine du relogement et l'installation des chalets. “Les parents d'élèves de l'ex-cité des 1200 Logements refusent d'envoyer leurs enfants à l'école du 1er-Novembre. Hier, nous n'avons reçu qu'une quarantaine d'élèves sur toutes les classes”, déclare un professeur. Cette situation a également contraint certains parents à inscrire leurs enfants dans d'autres wilayas, afin qu'ils étudient dans de meilleures conditions. “Nous ne pouvons pas envoyer nos enfants à peine âgés de 11 ans dans des minibus. Pourtant, les autorités nous ont promis le transport scolaire”, affirme un parent d'élève qui ajoute : “Nous voulons que nos enfants reviennent à leur ancienne école, puisqu'elle n'a pas été endommagée par le séisme.” Notons enfin que les parents d'élèves du primaire Ibn-Khaldoun observeront, aujourd'hui, un sit-in devant cette école, afin de persuader les sinistrés de quitter cet établissement. N. A.