Un scénario pessimiste sur la couverture des besoins a été présenté. Le clou du colloque international sur les restructurations des industries électriques et gazières : impact sur les coopérations inter-africaine et euro-maghrébine, organisé à l'initiative de Medenergie, revue méditerranéenne sur l'énergie, a été la présence de l'expert pétrolier Nicolas Sarkis. Dans sa communication, intitulée “Le contexte actuel et les perspectives énergétiques mondiales”, il a souligné que la demande d'énergie connaîtra un accroissement considérable. Toutes les prévisions disponibles indiquent que l'accroissement des besoins mondiaux en énergie se poursuivra à un rythme soutenu dans les décennies à venir. On prévoit un accroissement de la demande à 120-123 millions de barils/jour en 2025-2030 et que la part du pétrole dans ces besoins restera prédominante. Autrement dit, le pétrole a un bel avenir. Pour un pays comme l'Algérie, dont la capacité de production de brut est en progression et dont le potentiel est fort prometteur, même si c'est à une échelle plus réduite, ce sont des parts de marché à prendre. Ces perspectives font miroiter en principe une expansion des recettes hydrocarbures à long terme, si les découvertes suivent les investissements. Mais, dans les affaires pétrolières, les choses sont beaucoup plus complexes. Parmi les principaux pays consommateurs, ceux dont les besoins augmenteront le plus fortement, figurent les Etats-Unis, l'Inde, la Chine, la Corée du Sud, les autres pays du Sud-Est asiatique et l'Europe occidentale. Pour Nicolas Sarkis, cette dépendance accrue, occasionnée aussi bien par l'accroissement général des besoins que par le déclin de la production aux Etats-Unis et en Europe, signifie inévitablement une concurrence de plus en plus âpre entre les sociétés internationales et entre les pays importateurs, pour assurer la sécurité de leurs approvisionnements. Il a ajouté que le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, compte tenu de leur énorme potentiel, seront de plus en plus au centre de cette concurrence entre notamment les Etats-Unis, l'Europe, la Chine et l'Inde. Question fondamentale : l'offre sera-t-elle au rendez-vous de cette forte croissance de la demande pétrolière ? Sa conclusion est étonnante : étant donné, d'une part, les risques d'instabilité et de bouleversement politique au Moyen-Orient et, d'autre part, le niveau relativement bas des prix, il faudrait une forte dose d'optimisme pour considérer que les investissements requis, surtout dans l'amont pétrolier, puissent être réalisés à temps et que les pays de cette région puissent jouer le rôle clé dans la couverture des besoins énergétiques mondiaux. Si on suit ce scénario, on va vers une crise énergétique grave : une forte pénurie de pétrole. À moins que les producteurs d'autres régions puissent combler ce déséquilibre entre l'offre et la demande. Ce qui est fort incertain. Autrement dit, la possibilité de développer à temps les capacités de production nécessaire à la couverture de l'accroissement de la consommation reste très hypothétique. Pour éviter ce scénario, Nicolas Sarkis préconise une interdépendance et une coopération multiforme au niveau aussi bien des Etats que des autres acteurs concernés. Au cours du débat de la matinée, un intervenant s'est demandé pourquoi la libéralisation des marchés du gaz et de l'électricité n'a pas été suivie par celle du secteur pétrolier. Nicolas Sarkis a répondu que “l'expérience de privatisation en Russie est malheureuse”. Le secteur pétrolier en Russie est passé de l'Etat à une poignée d'hommes d'affaires, avec tous les scandales qui ont éclaté sur les pratiques de ces magnats de l'or noir. N. R.