Le Théâtre régional d'Oum El-Bouaghi a présenté, avant-hier soir à la salle Mustapha-Kateb du Théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi, la pièce Kef Enmer, écrite et mise en scène par Djamel Hamouda. Kef Enmer, c'est l'histoire d'El Bahri (Djamel Tiar) et Wanissa (Yasmina Ferriak) qui vivent ensemble depuis tellement longtemps qu'ils ont oublié pour qu'elles raisons ils se sont aimés. Ils sont si proches l'un de l'autre qu'ils passent la majeure partie de leur temps à se chamailler. Ce quotidien fait de maladresses et de reproches sera bouleversé par un évènement qui solidifiera leur lien : un groupe de personnes haut placé veulent détruire Kef Enmer – un site archéologique au milieu de la mer – et le transformer en un night-club. Cette nouvelle bouleverse les deux protagonistes ; et le couple décide de mettre tout en œuvre afin de protéger ce lieu, même au prix de leur vie. Alors que Wanissa et El Bahri se chamaillent (comme d'habitude !), ils reçoivent la visite de Satan (Hichem Guergah) et Ibliss (Ferhat Abdallah) : deux démons qui gardaient Kef Enmer et qui n'en pouvaient plus des humains ; ces derniers leur reprochant le moindre de leurs faux-pas. Commence alors une tirade soporifique sur le bien et le mal et tout ce que les hommes font comme mal et qu'ils n'assument pas. La résolution vient nous délivrer et réunir tout le monde. Kef Enmer traite maladroitement d'un sujet extrêmement sérieux : la mémoire. En effet, si on confisque à quelqu'un son histoire et son passé, que lui reste-t-il ? Mais pour arriver à cette conclusion, il en faut du chemin ! Les quarante premières minutes de la pièce (d'une durée d'une heure vingt minutes), sont consacrées à la relation entre El Bahri et Wanissa, ce qui pousse à l'interrogation : va-t-on encore une fois nous servir un spectacle sur les relations hommes/femmes et nous resservir ce débat existentiel sur les relations de couple (pourquoi on s'aime ? Qui est le plus fort ? Comment vivre sans lui ? Mais comment vivre avec lui…) ? Mais après interrogations et lassitude, le jeu est dévoilé, et si on n'a pas lu le synopsis sur le prospectus de la pièce, il n'y a aucun moyen de comprendre de quoi la pièce traite-t-elle réellement. Kef Enmer reproduit de vieux discours en usant à l'usure de l'humour de situation, et en jouant dans le registre burlesque. Djamel Tiar qui incarnait El Bahri avait une excellente technique qui frôlait la perfection n'était son manque d'émotion. Il était toutefois de niveau largement supérieur que ses autres camarades, notamment Yasmina Ferriak dont le débit et les tirades étaient incompréhensibles. Les nombreux monologues ont tué quelque peu la tension dramatique, et le rythme chutait à chaque fois que Djamel Tiar n'intervenait pas. Le capital des symboles n'a pas été utilisé à sa juste valeur puisque la robe de mariée (symbole de pureté mais également de relations) n'a pas été exploitée à sa juste valeur. En somme, Kef Enmer nous permet de réfléchir sur les passé, mais ses maladresses ont annihilé sa profondeur.