Premier rappel douloureux, les importations alimentaires algériennes ont quadruplé en quelques années, passant de 2 à 8 milliards de dollars. Ce qui souligne le caractère précaire de la position du pays, qui voit sa sécurité alimentaire atteindre et dépasser largement le seuil d'alerte. Comme il est souvent utile de rappeler des évidences, il faut souligner les liens indissociables entre les performances de l'agriculture et les possibilités de mise en œuvre de techniques d'irrigation fiable, donc de limitation du gaspillage afin d'arriver à réduire la dépendance alimentaire, vis-à-vis de l'étranger. Tout ce qui précède doit être considéré en de hors de la politique publique de soutien à l'agriculture et à l'industrie agroalimentaire, même si comme le souligne Mme Samia Kaïd, “il est urgent de définir les stratégies les plus compétitives et les mieux adaptées à l'Algérie pour arriver à limiter cette dépendance”. Inégalités et égoïsme D'après les données disponibles, avec le réchauffement climatique, la tendance au sud de la Méditerranée est à l'accroissement sensible des températures (de 1 à 2°C depuis les années 1970), au dérèglement des précipitations : longues périodes de sécheresse et précipitations diluviennes, avec de graves risques d'inondations, comme le montrent celles qui ont affecté la Tunisie en 1999, l'Algérie en 2001 et le Maroc en 2003 (voir livre sur Tipasa-Cherchell). Malgré ces sautes d'humeur de la nature, l'Algérie qui dispose actuellement d'une moyenne de 170l/j par personne d'eau potable, se trouve en situation de stress hydrique, si l'on tient compte des données onusiennes qui fixent les minima à 500l/j. Les plus gros producteurs agricoles mondiaux se sont mis à affecter systématiquement une grosse part de leur produits pour la fabrication de biocarburant, ce qui, au-delà du scandale humanitaire qui donne la priorité à l'automobile au lieu des hommes, rappelle que les énergies non renouvelables auront tendance à voir leurs prix augmenter et favoriser la tendance à la production de biocarburants dans les pays dépourvus d'hydrocarbures. “La volatilité des prix des hydrocarbures favorisera la volatilité des prix des céréales et du lait”, a rappelé Samia Kaïd, qui ajoute que “l'Algérie importe 75% de ce qu'elle consomme, soit 30% du total de la valeur de ses importations. Elle produit 25% de ses céréales et importe 60% du lait qu'elle consomme, se classant 7e importateur mondial de céréales”. Ressources hydriques et sécurité alimentaire dans le monde et en Afrique : un avenir sombre Maigre consolation, la question de la sécurité alimentaire ne concerne pas seulement l'Algérie, elle est devenue un objectif mondial. La population mondiale a été multipliée par 2,7 depuis 1950, et la consommation d'eau par 3,2. En effet, en 2025, 35% de la population mondiale vivra en stress hydrique et en 32050, 40% de cette même population manquera d'eau, ce qui ne manquera pas d'induire des conflits. Or, le plus étrange est que ce n'est pas la disponibilité de l'eau qui est en cause, mais son accès et le taux de pollution qu'elle présente. Si l'Afrique avec 5% de la population mondiale et 10% de ressources en eau disponibles se classe bien en apparence, par rapport à l'Europe (12% de la population et 8% de ressources disponibles) l'accès à cette eau pose problème. Selon les chiffres énoncés par A. Attar “1,5 milliard de personnes n'ont pas accès à l'eau dans le monde, alors que 2,5 milliards disposent d'un accès difficile à cette eau et que 30 000personnes meurent chaque jour dans le monde faute d'eau. Une majorité d'africains n'ont pas accès à l'eau”. Toujours selon l'ancien ministre des Ressources en eau, “la crise mondiale de l'eau, n'est pas due à la pénurie, mais à la gestion de cette ressource. On peut économiser l'eau chez soi et dans l'agriculture grâce des procédés économes et fiables”. L'Algérie menacée par la désertification et la pollution des eaux L'Afrique (et bien sûr l'Algérie) est la région la pus menacée par la désertification et la pollution des eaux, selon A. Attar. “70 millions d'hectares sont menacés de désertification”, selon les données rapportés par A. Attar qui, afin de souligne la gravité de la situation, précise que “l'agriculture représente 35% du PNB de l'Afrique et 40% de ses exportations, avec 720% des besoins en eau et 70% de a population rurale. 200 millions d'africains souffrent de malnutrition”. L'Algérie dispose des ressources en eau fabuleuses de l'Albien, soit l'équivalent de 60 000 milliards m3. Mais la population se concentre près des côtes ou dans la région du Tell. Si en 1975 les précipitations, selon A. Attar, ont atteint 19,4 milliards m3, elles se sont affaiblies suite au réchauffement climatique, et à d'autres facteurs peu connus. L'ancien ministre conclut son intervention par une prévision pessimiste à propos de conflits dus à l'eau et à son partage. Selon lui, “le XXIe siècle sera l'eau et de l'alimentation”. Des techniques d'irrigation plus efficaces et moins gourmandes en eau L'intervenant pour le groupe Benamor a abordé le problème de la culture de la tomate industrielle. Le groupe Benamor a réalisé une étude comparative des rendements en tenant compte de divers paramètres dont les techniques d'irrigation, aspersion et goutte à goutte. 60l d'eau sont nécessaires à la production d'un seul kilogramme de tomate. Dans la wilaya de Guelma, on est arrivé à produire 60 tonnes/ha, alors qu'avant, la production de tomates arrivait à 20t/ha. Afin de satisfaire les besoins du pays, il faut 500 000 tonnes de tomates fraîches pour produire 100 000 t de concentré, sur 16 000 ha. En aspersion, les besoins en eau sont de 7000 m3 d'eau par hectare, ce qui donne pour 16 000 ha, 112 millions m3. Or, le goutte-à-goutte réduit ces besoins à 4 000 m3/ha.