“Les états généraux de la société civile”, événement annoncé en grande pompe, s'ouvrent, aujourd'hui, au Palais des nations de Club-des-Pins. C'est une première dans les annales de l'Algérie indépendante, si l'on excepte le débat sur la Charte nationale adoptée en 1976. L'événement n'a pas manqué, depuis son annonce, il y a quelques mois, de susciter plusieurs réactions sur la scène nationale. Le déclin de l'Etat providentiel oblige, preuve en est la crise secouant plusieurs pays de la région, la société civile s'impose de plus en plus en tant qu'acteur incontournable dans la gestion de la société. Mais, quid de la représentation de cette société civile ? Voilà une question qui aura suscité et suscite encore des appréhensions chez nombre d'acteurs nationaux. Toutefois, en dépit de tout ce qui est dit et écrit, ici et là, sur cette initiative entreprise par le Conseil national économique et social (Cnes), et sous l'égide du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, les membres du comité de pilotage et de suivi des états généraux de la société civile, dont certains issus de l'opposition ou se démarquant de toutes les obédiences politiques, restent convaincus que cette initiative donnera lieu à une sorte de nouvelle feuille de route à même de consolider l'ordre démocratique ou, du moins, raviver la flamme des débats démocratiques. “L'exercice actuel n'est pas celui du pouvoir. Mais, plutôt un exercice qui vise la libération des textes des directives du centre”, soutient à ce titre, le Dr Ammar Belhimmer, un des membres dudit comité, contacté, hier, par téléphone. En ce sens qu'il justifie sa participation à l'initiative du Cnes par (sa) conviction qu'il faut “accorder le bénéfice du doute à toute initiative qui propose des transitions et des solutions pacifiques à la crise que traverse notre pays, à l'orée des crises des pays arabes”. Pour le Dr Belhimmer, professeur à la faculté de droit et néanmoins journaliste, les transitions “peuvent être formulées dans l'ordre démocratique installé”. Simple “kermesse”, comme estiment certains observateurs, ou “événement majeur”, comme présentée officiellement, le Dr Belhimmer reste convaincu que l'initiative du Cnes a le mérite d'exister et d'être soutenue, “pour peu qu'elle adapte et conforme ses actes aux principes démocratiques universels”. Lesquels principes, soutient-il, exige, notamment, l'instauration d'un “ordre constitutionnel stable et muable à caractère républicain qui consacre les principes de la République et la séparation des pouvoirs dans notre pays”. Aussi, enchaîne-t-il, les transitions doivent se faire “à l'intérieur de l'Etat, en dehors de toutes les considérations du régime, des partis politiques…” Pour M. Belhimmer, “seule la pérennité de l'Etat peut garantir l'intérêt général du pays”. D'où son insistance sur la nécessité de préserver “l'ordre”. Pourquoi préserver l'ordre ? Dans sa réponse, M. Belhimmer avertit que “les éléments fondamentaux de la menace viennent de l'extérieur (environnement géopolitique où évolue l'Algérie)”. Dans la foulée, notre interlocuteur ne tarit pas de critiques sur l'économie nationale. Pour M. Belhimmer, l'économie actuelle du pays présente une “double caractéristique”. Elle se présente, selon lui, à la fois, comme “une économie de comptoir” (importation et exportation de la nourriture) et une “économie de brique”, dans un modèle espagnol, soit une “économie pervertie et extravertie, accompagnée des transferts préjudiciaux soutenus par des Algériens vers l'extérieur, ce qui prive l'économie nationale des moyens d'accumulation des matériaux et moyens durables”. “L'économie actuelle participe à la formation de la bourgeoisie nationale plutôt que de s'accrocher au vieux dogme du secteur public qui devrait être une courroie de transition, de ressources et de prédation”, a-t-il commenté.