Tant pis pour ceux qui ont vu dans la position du secrétaire général du RND, un jour “éradicateur”, une opposition à la démarche islamiste du président Bouteflika. Sa conférence de presse tient de la mise au point ; elle restitue l'entière convergence stratégique entre Ouyahia et Bouteflika. La clarification a l'avantage de la sincérité. Dans toutes les questions abordées dans sa conférence, qu'il s'agisse de la répression de la presse, de la crise du FLN, du scandale Khalifa ou d'autres sujets, le Chef du gouvernement a répété les arguments de son président et ceux de ses ministres. De sorte que l'intervention du premier semble être destinée à confirmer la concordance de vue du pouvoir exécutif. Le départ des ministres FLN autorise désormais le recentrage pro-islamiste de la politique gouvernementale ; le RND y consent visiblement et ce n'est pas le compartiment intégriste qui s'y opposerait. L'intervention d'Ouyahia confine au constat d'homogénéité. En attendant un prochain et opportun remaniement, toujours possible mais jamais significatif d'une évolution politique du discours du leader du RND. Ouyahia, s'il se contraint, parfois, à adapter son langage à la circonstance, n'a jamais changé sur le fond : il assume sa conception autoritariste de la gestion du pays. C'est avec son aplomb habituel qu'il a repris les arguments de Zerhouni et Toumi au sujet de l'acharnement policier et juridique sur la presse, les références de Bouteflika sur la concorde civile, les thèses de Benachenhou sur l'affaire Khalifa. En attendant qu'il s'exprime, comme il vient de le promettre, sur son éventuelle candidature à la prochaine présidentielle, Ouyahia vient de confirmer son style fait de certitudes et de mépris. En prédisant un bilan positif de Bouteflika et de son gouvernement pour la fin de l'année, il fait fi de la réalité critique qui étouffe le pays. Une réalité politique marquée par le rejet consensuel, islamiste mis à part, du régime dont il dirige le gouvernement ; une réalité sécuritaire caractérisée par l'intacte et sanglante vitalité du terrorisme islamiste ; une réalité économique qui confine au blocage total ; une crise sociale qu'exprime un mouvement de protestation généralisé à tous les secteurs ; un Etat globalement transformé en immense appareil de répression et dont seules la justice et la police sont sollicitées par un pouvoir dont la vocation se résume à sévir. Le bilan présent est suffisant pour prononcer le fiasco, mais Ouyahia voudrait en rajouter avant de clore les comptes d'une gestion despotique et punitive comme l'Algérie n'en a jamais encore connue. Seulement, Ouyahia a l'habitude de revendiquer les méfaits et les dégâts de la gestion du régime et de son action propre comme autant de triomphes. C'est peut-être aussi cette compétence distinctive qui fait qu'il lui est si souvent fait appel. En politique comme ailleurs, on vit de ce qu'on peut. M. H.