Pour le chef de l'Exécutif, les principaux clignotants sont au vert. L'économie algérienne terminera l'année 2003 avec un taux de croissance de 6%, a annoncé, mardi, le Chef du gouvernement, M. Ahmed Ouyahia, lors d'une conférence de presse animée à la résidence d'Etat Djenane El-Mithaq. Mais, ce que ne dit pas Ouyahia, c'est que cette croissance est tirée essentiellement par la demande publique, l'agriculture et le secteur des hydrocarbures. Le secteur productif demeure toujours en difficulté. Des branches du secteur industriel public, qui avaient renoué avec la croissance en 1998, n'ont pas pu la maintenir. L'industrie publique stagne avec un taux de croissance de -1%. Encore faut-il préciser que les résultats auraient été plus mauvais si on avait extrait de l'indice la branche fer et sidérurgie, qui a atteint un taux de croissance de 55%, nous dit-on, du fait des performances d'Ispat. Les restructurations tardives et incomplètes, l'ouverture brutale du marché, les taux d'intérêts sur une longue période très élevés, couplés à une dévaluation forte du dinar, ont largement contribué à dévitaliser durant près de deux décennies les secteurs productifs privés et publics industriels par un transfert massif de ressources financières vers la sphère commerciale et informelle sous fiscalisée. Le Chef du gouvernement rappelle que le parc économique qu'il avait laissé, en 1998, avait 90 milliards de découvert : “À mon retour à la tête du gouvernement, il était de 251 milliards de dinars de découvert.” Cependant, il faut le reconnaître, les 6% de croissance restent la meilleure performance réalisée depuis deux décennies. Sera-t-elle stable et durable ? Ouyahia lui-même reconnaît qu'il faudrait des taux de croissance de 7 à 8%, sur une dizaine d'années, pour résoudre les problèmes et relancer l'emploi. Malheureusement, bien qu'indispensables pour permettre la restauration des conditions de production rentables dans les entreprises publiques et le développement de l'entreprenariat privé, les réformes engagées jusqu'à présent peinent à se concrétiser. En particulier, le processus de privatisation du secteur productif a des difficultés à déboucher sur des opérations concrètes, en dehors des exemples d'Ispat et de Henkel. En parlant de privatisation, Ouyahia affirme que “l'Etat est prêt à vendre, exceptés les secteurs stratégiques. Cela se fera en concertation avec le partenaire social”. Il déplore “la ruée du capital local vers des opérations de spéculation et de gain facile plutôt que de s'orienter vers des opérations de développement et de création d'emplois”. C'est que le climat d'investissement, de l'avis même de la Banque mondiale, n'est pas favorable. Il est même contraignant. En outre, la cohérence des sphères monétaire et réelle, témoignant de l'état de développement et de l'efficacité d'une économie, est totalement absente en Algérie. En d'autres termes, il n'existe pas d'unité fonctionnelle entre la sphère monétaire et bancaire et la sphère réelle : excédents budgétaires et réserves de changes, estimés par Ouyahia à 30 milliards de dollars à fin septembre dernier, mais la croissance est tirée principalement par les demandes publiques, l'agriculture et les hydrocarbures. À propos des disponibilités bancaires, les entreprises soulignent les difficultés d'accès aux crédits à l'investissement. “Il est heureux que le Chef du gouvernement affirme que l'embellie financière de l'Algérie, avec des réserves de change de plus de 30 milliards de dollars, ne doit pas empêcher la poursuite des réformes économiques”. Ouyahia est satisfait des résultats du plan de soutien à la relance économique. Et ce, contrairement à M. Harchaoui qui, un jour, avait déclaré que “le plan de relance est parti dans la réfection des trottoirs”. 9 500 projets ont été réalisés sur les 14 000 de prévus. “Il sera suivi par d'autres efforts pluri-annuels pour le soutien de la croissance”, souligne Ouyahia. M. R.