Depuis plus d'une quarantaine d'années, Wahiba se cogne la tête contre les murs. Elle se heurte à une seule interrogation : qui sont ses parents ? Née sous X en 1967, elle a été adoptée à l'âge de trois ans par une famille à Alger. En larmes, elle nous raconte son histoire dont elle ne se remémore que des faits importants ayant marqué sa vie. “Je ne me souviens ni de mon enfance ni de ma jeunesse. Ma mère adoptive m'a toujours caché la vérité. Ce n'est que deux jours avant l'examen du BEM que j'ai appris par l'enseignante que j'étais placée par la DAS chez cette famille”, confie Wahiba. Acceptant mal la trahison de sa mère adoptive, qui a acheté un formulaire d'extrait de naissance vierge pour le remplir ensuite à son nom, elle considère être “victime d'une double trahison. D'abord, de la part de ma mère biologique qui m'a abandonnée, ensuite, de celle qui m'a adoptée.” “J'étais une brillante élève et si j'avais terminé mes études, j'aurais pu être un cadre supérieur. Malheureusement, j'ai dû abandonner. Depuis la découverte de mon statut d'enfant né sous X, je vis dans l'incertitude et le désarroi", témoigne encore Wahiba qui découvre sa véritable identité à l'âge de 27 ans après le décès de sa mère adoptive. “Quelques années après, ma mère adoptive est décédée. Suite à cela, je découvre par mon père adoptif que je n'étais pas inscrite sur le livret de famille. Aujourd'hui, je vis au sein d'une deuxième famille d'accueil mais j'ai peur de subir le même sort”, appréhende-t-elle. Wahiba dénonce le silence des autorités concernant le statut de ces enfants. Elle ne demande qu'à être reconnue en tant qu'individu. “Je n'ai pu avoir mon premier extrait de naissance qu'à l'âge de 29 ans. Le plus douloureux pour moi, c'est quand j'ai découvert que je porte une notion (catégorie T), ce qui signifie enfant trouvé. J'ai commencé alors à me demander où les services de la DAS m'ont-ils trouvée ? Dans une rue ? Dans un bac à ordures ? Sur une voie publique ? Sur un trottoir ? Pourquoi ce mépris de la part des autorités ? Non seulement on est rejetés par nos parents biologiques, adoptifs, s'ajoute à cela, la société. Du statut de victimes, nous sommes considérés comme des coupables payant les erreurs des autres”, enrage Wahiba.