De nouvelles tensions sur les marchés, liées à la crise de la dette souveraine européenne, ouvrent des perspectives inquiétantes pour l'économie mondiale alors que les dirigeants européens tardent à arrêter les mesures susceptibles de stopper réellement l'hémorragie. Plombée par la crise grecque, la banque franco-belge Dexia vient de perdre plus de 4 milliards d'euros au deuxième trimestre de cette année et la dégringolade des places financières s'observe partout depuis quarante-huit heures. Après les Bourses asiatiques, les européennes sont touchées. Pourtant jeudi dernier, Jean-Claude Trichet, le président de la Banque centrale européenne avait pris les devants en tentant de baisser cette tension. Il avait en effet annoncé son intention d'acheter des obligations d'Etat européennes, une annonce susceptible de calmer les investisseurs. Or, l'effet a été inverse à celui attendu. Au contraire, les investisseurs se sont montrés méfiants. L'exhortation du président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, selon laquelle les dirigeants européens devraient “envoyer un signal sans ambigüité montrant que la zone euro va résoudre la crise de la dette souveraine” n'a pas, non plus, calmé les esprits. Pourquoi ? Parce que la confiance n'y est plus. En considérant par exemple que la Grèce pouvait être déclarée en défaut partiel de paiement, les chefs d'Etat et de gouvernement, réunis le 21 juillet à Bruxelles, n'ont fait que susciter la crainte de défaillances de paiement aux yeux des investisseurs vendant leurs obligations à risque pour des produits plus attrayants. Et la propagation de la crise budgétaire de la zone euro a entraîné de nouveaux pays dans la tourmente. Hier l'Irlande, la Grèce, le Portugal ou l'Espagne et maintenant l'Italie, Chypre ou d'autres Etats comme la Belgique qui bénéficie cependant encore de taux favorables en raison de l'arrimage de son économie à la locomotive allemande. Hier, vendredi, la chute observée précédemment n'a fait que se confirmer. L'indice SJ STOXX 600 a dévissé de 3% à l'ouverture et des chutes similaires ont été observées à Francfort, Londres, Paris, Amsterdam et Bruxelles. Pourtant, la Banque centrale européenne venait d'injecter de nouvelles liquidités sur les marchés interbancaires mais en créant davantage d'argent, pour le moment on risque de favoriser une spirale inflationniste aux conséquences désastreuses. Cette crise de confiance est en outre renforcée par le spectre d'une récession américaine résultant d'une dette abyssale qui atteint d'ores et déjà 100% du produit intérieur brut des Etats-Unis. Une dette qui gonfle, mise en évidence devant le monde entier, par les dissensions entre républicains et démocrates de ces dernières semaines… Une consommation et des pouvoirs publics en panne Comment sortir de cette crise qui inéluctablement touche toutes les économies de la planète dans une économie de plus en plus mondialisée ? Peter Van Houte, un économiste à la Banque ING plaide comme d'autres pour des solutions plus profondes arrêtées à l'échelle de l'Union européenne. “À court terme, je vois mal comment arrêter cette hémorragie en Europe sauf si les autorités arrivent à délivrer un message de confiance, vient-il de déclarer. Pour cela, à situations exceptionnelles, il faudra des solutions exceptionnelles.” Une plus grande gouvernance économique, prônée par le président des 27, Herman Van Rompuy, irait dans la bonne direction mais des mesures très simples tardent déjà à voir le jour. La concrétisation des décisions arrêtées au Sommet des chefs d'Etat le 21 juillet en est un exemple, et ce n'est qu'en décembre de cette année que Van Rompuy pourrait devenir Monsieur euro… Pour Philippe Maystadt, le président de la Banque européenne d'investissement, “ce qui se passe donne raison à ceux qui réclament la création d'obligations européennes avec une agence européenne de la dette et la naissance d'un ministre européen des Finances”. Mais tous les dirigeants européens, et notamment les Allemands, ont-ils envie de renforcer cette gouvernance européenne ? Confrontés aux endettements colossaux et aux troubles sociaux, seront-ils prêts, dès lors à affronter de nouveaux défis tout en mutualisant les risques pour redonner, enfin, la confiance et desserrer les tensions sur les marchés ?