Bachar Al-Assad avait assuré, en fin de semaine dernière, au secrétaire général de l'Onu Ban Ki-moon que les opérations de l'armée et de la police contre les manifestants avaient cessé, mais cette allégation a été démentie sur le terrain par l'opposition. Selon des membres de l'opposition, l'armée a continué ses raids, notamment dans la ville de Daïr Az-Zour, et des blindés et des soldats ont pris position autour d'une mosquée de Lattaquié. Bachar se serait même trouvé une vocation identique à celle de Pinochet en faisant abattre des civils dans un stade ! En cinq mois, ses forces militaires et paramilitaires ont tué au moins 1 900 civils, souvent à bout portant, selon un dernier rapport de l'Onu qui parle de “crimes contre l'humanité”. Tout se passe comme si on allait faire emprunter à Bachar le chemin de croix dans lequel s'est engagé son homologue libyen Kadhafi. Pour la première fois depuis le début de la répression, les Etats-Unis et l'Union européenne ont réclamé ouvertement jeudi la démission de Bachar Al-Assad, qui a succédé à son père Hafez en 2000. “Pour le bien du peuple syrien, le moment est venu pour le président Assad de démissionner”, ont clamé à l'unisson Obama, Sarkozy, Cameron et Mme Merkel, qui ont également ordonné le gel des avoirs du gouvernement de Damas et interdit à leurs ressortissants d'avoir des relations commerciales et d'investir en Syrie. Les exportations pétrolières syriennes, 8 milliards d'euros en 2010, estime la CIA sur son site, sont destinées à l'Irak, le Liban et l'Allemagne. Washington, Londres, Paris et Berlin ont annoncé travailler au corps le Conseil de sécurité pour le faire sortir de sa “moiteur”. Une mission des Nations unies se rendra aujourd'hui en Syrie pour évaluer la situation humanitaire dans le pays. L'ambassadeur de Syrie à l'Onu a accusé Washington de mener, avec certains membres du Conseil de sécurité de l'Onu, “une guerre diplomatique et humanitaire” contre la Syrie. “Ces pays tentent de régler de vieux comptes avec mon pays”, a-t-il déclaré. La réaction est ferme mais Damas a accepté la mission. Ce n'est pas rien car cela signifie que ses autorités sont vraiment au fond du gouffre, malgré le soutien de ses partenaires russes et iraniens. Le président ensanglanté s'inquiète de son image mais n'entend pas s'évaporer de sitôt. Il se sent fort. Et pour cause. La Russie continue de lui livrer des armes. C'est le patron du groupe public Rosoboronexport, Anatoli Issaïkïne, qui l'a déclaré : “Tant qu'il n'y a pas de sanctions ni d'instructions ou d'ordre du gouvernement russe, nous sommes tenus de remplir nos engagements contractuels et c'est ce que nous faisons en ce moment”. Mais la Russie pourra-t-elle indéfiniment menacer de veto toute résolution onusienne alors que Bachar continue de tirer sur des civils avec chars et hélicoptères ? Tous les regards sont dirigés sur Moscou, qui peut faire en sorte que la population syrienne gagne du temps et des vies. Medvedev le sait. Quant à Bachar, tout le monde reste convaincu, il n'a pas d'autre issue que le chemin de croix emprunté par le tyran de Tripoli.