Pourquoi autant d'attentats en si peu de temps et avec une telle facilité ? Pour expliquer ce spectaculaire regain de l'activité terroriste, chacun y va de sa version. Cinq attentats terroristes en l'espace de cinq jours seulement dans la wilaya de Tizi Ouzou ! Jamais la Kabylie n'a enregistré un si grand nombre d'attaques en une période aussi courte même si, ces dernières années, la région, réfractaire pourtant à l'idéologie islamiste, est devenue un repaire des desperados d'Al-Qaïda. Inaugurée par l'attentat kamikaze du 14 août qui a ciblé la sûreté urbaine de la wilaya de Tizi Ouzou et fait plus de 30 blessés, cette spectaculaire dégradation de la situation sécuritaire a été vite suivie par d'autres forfaits. Le 17 août, l'explosion d'une bombe à Si Mustapha (Boumerdès) a fait 1 mort et 5 blessés. La même journée, un accrochage entre la police et un groupe armé a eu lieu au chef-lieu de la commune de Béni Aïssi, à 15 km de Tizi Ouzou. Le lendemain, dans un lieu-dit de la même commune, la voiture du chef de la police de Béni Douala a été prise pour cible. Bilan : un policier et un civil tués. Durant la journée de jeudi, l'on a enregistré pas moins de 2 attentats : le premier à Azeffoun où un capitaine de l'armée a été blessé suite à l'explosion d'une bombe artisanale et le second à Maâtkas où trois personnes parmi un groupe de villageois, venues secourir un des leurs pris en otage par des hommes armés, ont été assassinées. C'est dire que la Kabylie vient de vivre une semaine d'enfer qui l'a plongée dans un climat de terreur digne de l'embrasement des années 90 qui avait pourtant épargné cette région. Comme de coutume, aucun officiel n'a prononcé un traître mot de condamnation. Même le directeur général de la Sûreté nationale, Abdelghani Hamel, en déplacement dimanche à Tizi Ouzou, le jour même de l'attentat qui a ciblé la sûreté urbaine de la wilaya, s'était gardé de faire la moindre déclaration publique. Le même silence pesant et inexplicable est observé chez la classe politique hormis le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) qui a rendu public un communiqué pour condamner ces forfaits et présenter ses condoléances aux familles des victimes. Pourquoi autant d'attentats en si peu de temps et avec une telle facilité ? Pour expliquer ce spectaculaire regain de l'activité terroriste, chacun y va de son explication. Certains l'imputent à l'inefficacité de la lutte antiterroriste et des barrages filtrants qui maillent toute la ville de Tizi Ouzou alors que policiers et militaires ont bénéficié d'un matériel adéquat. D'autres crient à la faillite du renseignement et désignent du doigt les derniers changements entrepris dans les corps des services de sécurité de la wilaya de Tizi Ouzou. D'autres encore y voient la conséquence directe de la politique de réconciliation nationale menée par Bouteflika, qui a requinqué le moral des terroristes et démobilisé les citoyens. Le RCD de Saïd Sadi a proposé une toute autre grille de lecture. Pour lui, ce qui se passe actuellement en Kabylie est la résultante de luttes au sommet. “À chaque fois que les clans se déchirent à Alger, la Kabylie est mise sous tension”, explique-t-il non sans dénoncer le système qui “a fait de la violence et de la manipulation une stratégie, livrant la population de la région aux tueries, aux kidnappings et à la délinquance”. “Pourquoi la Kabylie est-elle une fois de plus particulièrement ciblée ? Pourquoi cette recrudescence survient-elle dans un moment de grandes incertitudes sur la cohésion et le futur immédiat du pouvoir ?”, s'est-il interrogé.En juin dernier déjà, quand des militaires s'étaient rendus coupables de “bavures” à Azazga, le RCD avait fait part de l'existence de “scénarii qui travaillent méthodiquement à la déstabilisation de la Kabylie pour y semer la mort à chaque fois que le système est face à une impasse”.