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Rush des Tunisiens sur le marché d'Aïn Fakroun
À l'approche de L'AId et de la rentrée scolaire
Publié dans Liberté le 27 - 08 - 2011

Le jour du marché, c'est mercredi. Dès les premières heures, malgré la chaleur et le Ramadhan, des ressortissants tunisiens par dizaines prennent d'assaut les magasins. Tout y passe : cosmétiques, vêtements pour enfant, produits alimentaires…
Aïn Fakroun, la capitale par excellence de l'importation tous azimuts et du prêt-à-porter particulièrement vit ces derniers jours du mois de Ramadhan au rythme d'un mouvement soutenu de commerce. Des processions de voitures immatriculées des différentes régions du pays, défilent, pratiquement chaque jour à travers les artères et les allées de cette bourgade située à 26 km du chef-lieu de la wilaya d'Oum El-Bouaghi.
On y voit même des plaques minéralogiques tunisiennes. Ce grand village, qui tire son nom d'une montagne esquissée comme l'organisme d'une tortue, doit sa réputation nationale et transfrontalière à la loi sur l'ouverture du marché extérieur intervenue après les évènements d'Octobre 1988. Après le phénomène de “cabas” des émigrés durant les années 1980, le commerce du conteneur et du “carton”, comme on dit ici, prend une place de choix. Aïn Fakroun est devenue, au fil des années qui s'égrènent, une plaque tournante du business et du prête-à-porter. Les jeunes chômeurs des autres localités limitrophes se bousculent chaque jour que Dieu fait, aux portes d'Aïn Fakroun. Ils scrutent l'arrivée des gros camions transporteurs de marchandises. Ils viennent décharger des conteneurs bourrés d'articles importés de Chine ou de Turquie. On en décharge par milliers, pour ne pas dire plus, à chaque arrivage, moyennant 8 000 à 12 000 DA par conteneur. D'ailleurs, on parle ici et avec insistance de l'industrie de décharger les conteneurs. C'est dire que la carton ça fait vendre et crée de l'emploi, même temporaire mais lucratif. La ville ne désemplit pas de cette activité, juteuse et qui, attire de plus en plus.
On y vient de partout. De simples clients acheteurs, des pères de famille, des commerçants, et même des revendeurs à la sauvette, de toutes les régions, d'Alger, d'Oran, d'El-Oued, de Djanet et même du Sahara occidental et de la Tunisie. En réalité, l'affluence des Tunisiens vers Aïn Fakroun va crescendo. Cet afflux de Tunisiens s'est fait notamment sentir depuis une année. Ces commerçants qui prennent alors d'assaut les magasins d'Aïn Fakroun s'approvisionnaient auparavant à Ras Djedir, située entre les frontières tunisiennes et libyennes. Depuis les évènements libyens, ils se sont rabattus alors sur Aïn Fakroun et El-Eulma. Le jour du marché, qui est le mercredi, l'affluence des Tunisiens pulvérisent tous les records. Dès les premières heures, malgré la chaleur et le Ramadhan, ça grouille de monde. Des familles accompagnées de leurs progénitures pour l'achat des vêtements de l'Aïd et de la rentrée, des détaillants, des grossistes, tentent de se frayer un chemin ou se disputent une place de stationnement sur les allées étriquées. Des dizaines de groupes tunisiens sont là aussi. Ils raflent tout, habillement surtout pour enfants et femmes, cosmétiques, parfums. Tout y passe : cosmétiques, vêtements pour enfants, produits alimentaires…
Les négociants de la ville doublent, voire triplent leurs chiffres d'affaires depuis l'arrivée des Tunisiens. À travers les magasins, un grossiste revendeur de costumes nous prend à témoin, pour nous avouer qu'il a réservé toute sa marchandise aux Tunisiens. “Ils sont des dizaines qui viennent acheter chez moi des costumes chaque semaine”, nous lance fièrement ce commerçant. Dans un magasin de vêtements mitoyen au premier, deux Tunisiennes accompagnées d'un homme qui s'avère être leur guide accompagnateur, et même temps “barman”, paraissent très exténuées par le voyage fait par route. “Nous avons démarré de Tunis à minuit, nous sommes arrivés ici à 8 heures du matin. Cela n'est pas du tout un souci. Nous avons l'habitude de faire ce genre de trajet même durant le mois sacré. Notre problème aujourd'hui est lié à l'augmentation des prix, et ce, depuis la fermeture de la frontière avec la Libye”, fulminera timidement l'une d'elles. Satisfaite de l'accueil fraternel et des rapports qu'elle entretient avec les Algériens, elle ne manque pas de se plaindre et de réitérer ses craintes des agressions sur la route. À ce titre, elle nous rappelle qu'“au début du mois de Ramadhan, des jeunes sur des motos à Aïn Beïda, route des poids lourds, ont attaqué 3 voitures et un minibus”. Et d'ajouter : “Hier encore, un véhicule a été pris en course-poursuite par des jeunes, toujours sur motos, entre Meskiana et Tébessa.” Poursuivant ses révélations, précisant qu'elle vient régulièrement depuis une année et qu'elle n'a jamais eu de problèmes de ce genre. Maintenant, elle se dit plus au moins inquiète. “Je commence à avoir peur, surtout des motos.” Assise à même le sol, une autre Tunisienne originaire de Sousse, chauffeur de taxi de son état, nous prend à témoin : “Nous sommes sortis de Sousse après le f'tour. À minuit, nous étions déjà à la frontière. Mes clients sont en majorité des familles. Ma voiture pourra prendre jusqu'à 7 personnes qui payent 100 dinars tunisiens chacun, en aller-retour. Parfois quand la demande de voyageurs se fait davantage sentir, j'utilise mon minibus.” Et de poursuivre : “Ceux qui viennent, à présent, à Aïn Fakroun faisaient auparavant leurs achats au poste frontalier Ras Djedir. On y vient deux fois par semaine. Aujourd'hui, l'argent se fait rare en raison de la situation qui prévaut en Tunisie, celui qui faisait avant tourner 50 millions de dinars tunisiens, n'en a que 5 millions aujourd'hui. Je demande aux autorités algériennes d'assouplir un peu les contrôles douaniers sur les routes”, conclura-t-elle.


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