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Malainin Lakhal, SG de l'Union des journalistes et écrivains sahraouis
“Les raisons du rapprochement entre l'Espagne et le Maroc”
Publié dans Liberté le 01 - 11 - 2011

Rappelant que les camps de réfugiés sahraouis ont été “à l'abri de toute sorte de problèmes de sécurité pendant les trois dernières décennies”, Malainin Lakhal n'exclut pas que le Maroc pourrait être derrière le récent enlèvement des trois travailleurs humanitaires, dans le but de terroriser les sympathisants de la cause sahraouie et les pousser à arrêter l'aide humanitaire et leurs efforts politiques.
Au sujet des efforts déployés pour localiser les deux Espagnols et le ressortissant italien, enlevés samedi 22 octobre 2011 dans les camps de réfugiés sahraouis par un groupe non identifié, la ministre espagnole des Affaires étrangères, Trinidad Jimenez, a effectué une visite soudaine au Maroc, mardi et mercredi, pour rencontrer son homologue marocain Fassi Fihri, le Premier ministre et le roi du Maroc Mohammed VI, selon le journal marocain Al-Alam, l'un des médias officiels de la monarchie. Le but de cette visite était de “discuter des relations bilatérales, en particulier par rapport à la coopération dans le domaine de la sécurité, la migration illégale et le narcotrafic international”.
La ministre espagnole a en outre déclaré que son pays compte sur la solidarité du gouvernement marocain. Selon Jimenez, Rabat a exprimé sa volonté de coopérer dans les efforts pour sauver les trois victimes enlevées, ajoutant que le gouvernement espagnol “bâtit avec le Maroc de larges relations de coordination en matière de lutte contre le terrorisme, et c'est quelque chose qui peut être d'une grande aide” dans les événements qui ont eu lieu cette semaine.
Mais, bien sûr, le fait même d'organiser une telle visite de Jimenez au Maroc, la première, et probablement la dernière, avant les prochaines élections, afin de discuter des sujets mentionnés, et le choix du Maroc comme destination à la lumière des enlèvements récents, corrobore l'analyse que nous avons faite dans un article précédent, dans lequel nous nous interrogions sur la possibilité d'une implication des services secrets marocains dans cet enlèvement qui cible autant les trois amis du peuple sahraoui que les camps de réfugiés sahraouis et le Front Polisario, surtout que ce dernier prépare son 13e congrès qui aura lieu dans la zone libérée de Tifariti en décembre prochain.
Le choix de Maroc par Jimenez pour demander l'aide dans la libération des trois Européens enlevés ne peut pas être une coïncidence.
Une alliance contre nature
Le gouvernement espagnol actuel est bien placé pour savoir les relations douteuses que le Maroc occupe au sein des cercles de la criminalité internationale et les groupes terroristes dans le Sahel et ailleurs.
Chacun se souvient des accusations qui ont été proférées contre le régime marocain après les terribles attaques terroristes de Madrid qui ont causé la défaite du gouvernement populaire de José Maria Aznar et son parti en Espagne.
Et que le Parti populaire espagnol a payé un lourd tribut pour son opposition à la thèse marocaine du Sahara occidental en raison de sa neutralité relativement active dans la question. Et plus important encore, tout le monde se souviendra que le gouvernement de Zapatero a ensuite été le plus grand bénéficiaire de cette opération terroriste tragique, exécutée par des terroristes marocains. En fin de compte, la victoire du parti de M. Zapatero aux élections était réalisée en grande partie grâce à ce terrible acte.
D'un autre côté, les révélations de WikiLeaks ont largement dévoilé les liens suspects que les généraux du roi du Maroc et son proche entourage ont tissé avec les réseaux internationaux de trafic de drogue et blanchiment d'argent qui lient les groupes criminels de la Colombie et d'autres pays latino-américains aux autorités marocaines, qui s'étendent de l'Afrique du Nord à l'Europe pour atteindre l'Egypte et Israël en passant par les pays du Sahel, notamment le Mali et le Niger.
Ces réseaux, selon de nombreux experts en sécurité, sont bien utilisés par les services secrets marocains, qui opèrent à travers de nombreux terroristes marocains et des “connexions” pour infiltrer des groupes terroristes se trouvant dans le nord du Mali. De notre point de vue, l'un des principaux objectifs des services marocains de cette relation particulière avec le terrorisme est d'infiltrer le mouvement de libération sahraoui, le Front Polisario et les camps de réfugiés sahraouis, dans le but de créer des problèmes aux autorités sahraouies dans ces camps, qui ont été à l'abri de toute sorte de problèmes de sécurité pendant les trois dernières décennies. Les réfugiés sahraouis reçoivent des milliers de visiteurs étrangers chaque année, des familles, des travailleurs humanitaires, des artistes et des musiciens, des universitaires et des politiciens de partout dans le monde.
Cela dit, nous croyons que cette dernière opération terroriste vise le projet national sahraoui et les amis humanitaires du peuple sahraoui afin de les terroriser et de les forcer à arrêter leur soutien, leur aide humanitaire et leurs efforts politiques en faveur du peuple du Sahara occidental, dernière colonie en Afrique.
Nous craignons que cette attaque terroriste contre les trois amis du peuple sahraoui puisse être une première étape dans une série d'opérations en cours pour cibler les camps des réfugiés sahraouis, et viser dans une étape ultérieure non seulement nos visiteurs étrangers, mais aussi certains dirigeants et cadres sahraouis, des citoyens ordinaires et même les réfugiés dans une tentative de propager la peur et la terreur parmi la population sahraouie, semer le cynisme, le doute et le pessimisme dans le cœur des gens pour essayer de nous forcer à abandonner la lutte pour la liberté de notre pays illégalement occupé par le Maroc.
La guerre psychologique
du Maroc contre les Sahraouis
D'un autre côté, on peut dire à juste titre que cette opération terroriste n'est qu'un aspect de la guerre psychologique que le Maroc mène contre le peuple sahraoui dans le but de miner sa confiance en son avant-garde politique, le Front Polisario, mais aussi secouer la confiance et peut-être même la conviction dans la fiabilité de l'objectif national sahraoui, l'indépendance de notre pays, qui est soutenu par le mouvement de solidarité international et des défenseurs des droits humains.
Le Maroc a sans cesse travaillé pour exacerber le tribalisme/régionalisme parmi les Sahraouis, en utilisant toutes sortes de sales tactiques comme l'achat de l'allégeance des individus faibles, diffuser des informations inexactes et toxiques pour discréditer les militants sahraouis, nourrir les luttes individuelles entre les Sahraouis dans le but de créer une atmosphère de désordre et de manque de confiance, en encourageant le trafic de drogue et le crime organisé, en plus de la diffusion régulière de propagandes.
Toutes ces tactiques, comme il est bien connu, ont historiquement été utilisées par toutes les puissances colonisatrices contre les nations colonisées en lutte. Un autre indice de la complicité maroco-espagnole contre le Front Polisario a été prouvé lorsque, mardi à Rabat, Mme Jimenez a appelé l'ONU à “évaluer les mesures de sécurité dans les camps de réfugiés sahraouis.” Cette réclamation a également été reprise par son homologue marocain, Fassi Fihri, qui a attribué à l'Algérie l'entière responsabilité de l'attentat terroriste, affirmant que la région de Tindouf n'aurait pu être atteinte par les terroristes si l'Algérie et le Polisario n'avaient pas permis aux attaquants de franchir les frontières.
Il se peut que Fassi Fihri ait voulu dire que les autorités espagnoles ont permis aux terroristes marocains d'opérer en Espagne dans les nombreuses attaques terroristes commises au cours des dix dernières années. Ou encore, que tous les pays qui ont été victimes d'attaques terroristes par Al-Qaïda ou d'autres groupes ont été complices des auteurs. Des allégations telles que celles de Fihri ne peuvent qu'être qualifiées d'absurdes et inacceptables, outre le fait que l'expérience a prouvé qu'aucune nation n'est à l'abri des attaques terroristes, et qu'aucun pays ne peut prétendre être en mesure d'y faire face seul. Pour en revenir au cas des trois Européens enlevés, l'Espagne va certainement opter pour des négociations avec les terroristes afin de les libérer, grâce bien sûr à la “connexion marocaine”.
Le PSOE de Zapatero au service
du Makhzen
Madrid, comme d'habitude, va se plier aux conditions de Rabat, qui va relancer ses attaques contre le Front Polisario et la République sahraouie dans une tentative de le montrer comme une entité politique faible qui est incapable de protéger son propre territoire. Et c'est une idée constante qui a été défendue par la propagande marocaine depuis plusieurs années, dans le but de vendre au monde l'histoire que le Sahara occidental ne peut être sûr que sous contrôle marocain.
Après tout, le gouvernement de Zapatero doit un tel service au roi du Maroc. Il ne faut pas oublier que le Parti socialiste ne sortira pas gagnant des prochaines élections, alors il doit faire un geste pour le Maroc à la fin de son mandat. En outre, il est fort probable que l'Espagne va être forcée de déposer les armes dans l'avenir, même si le Parti populaire remporte les élections.
Le gouvernement espagnol sait bien que la monarchie marocaine ne peut lancer une véritable guerre contre ses voisins européens en utilisant le narcotrafic, le terrorisme, la contrebande et les milliers de migrants africains clandestins (tolérés dans toutes les villes du Maroc en attendant le moment propice de les utiliser).
Néanmoins, la République sahraouie ne peut pas être excusée en cas de manque dans son devoir de protéger ses propres amis, qui visitent nos camps de réfugiés au cours de chaque année. Les autorités sahraouies sont bien conscientes que le Maroc mène une sale guerre contre le projet politique national sahraoui et, par conséquent, le Polisario doit adopter des mesures de sécurité plus vigoureuses pour être prêt à tous les scénarios possibles que le Maroc pourrait être en train de préparer.
À cet égard, il est probable que l'attaque terroriste actuelle ne soit qu'un prélude à de nombreuses autres opérations et d'une propagande pour empêcher la célébration du 13e congrès du Front Polisario dans la zone libérée de Tifariti. Le fait d'attaquer des travailleurs humanitaires étrangers n'est pas une coïncidence, le Maroc veut effrayer les amis du peuple sahraoui de participer au congrès au mois de décembre prochain. Par ailleurs, il est inacceptable de permettre au Maroc de commettre tous ces crimes en toute impunité.
Le mouvement international de solidarité devrait mener sa propre guerre d'information afin de sensibiliser sur le conflit, et de dévoiler tous les plans marocains. Le Maroc doit être traduit en justice pour les violations des droits humains, le pillage des ressources naturelles, la répression politique contre les Sahraouis et les Marocains.
Et avant que M. Fassi Fihri ou Jimenez donnent des conseils et des leçons aux Sahraouis sur la façon de protéger leur territoire, ils doivent d'abord faire face à leurs propres défaillances et incompétence internes en tant qu'Etats économiquement ratés et qui ne respectent pas le droit international au Sahara occidental.
M. L.
(*) Secrétaire général de l'Union des journalistes et écrivains sahraouis
Anti-menteurs 01-11-2011 10:48


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