Le désormais ex-premier secrétaire du parti assure que son remplacement “obéit à la règle d'alternance au sein du FFS”. Le leader charismatique du Front des forces socialistes (FFS), Hocine Aït Ahmed, innove en matière de pratiques politiques : il dégomme et nomme… par vidéo. Victime de cette grande trouvaille : son jeune premier secrétaire, Karim Tabbou, qui vient de se voir signifier son remerciement par le biais d'un message filmé. Cette forme de limogeage n'est pas, quelque part, inélégante ? Peut-être. À se fier à certaines indiscrétions, le leader historique a déjà suspendu, il y a quelques mois, les travaux du conseil national par simple coup de téléphone. Mais, sur le fond, la décision d'Aït Ahmed est tout à fait conforme aux statuts du parti. Et le premier à le dire est Karim Tabou lui-même qui, dans une déclaration au site DNA, a soutenu : “La décision de procéder à la nomination d'un nouveau secrétaire national a été prise le 18 novembre, à l'issue du conseil national. C'est le président du parti, Hocine Aït Ahmed, qui a pris la décision, conformément aux statuts du FFS.” Mieux, il assure que son remplacement “obéit à la règle d'alternance au sein du FFS”. Il faut savoir que Karim Tabou devait quitter son poste en septembre dernier, à l'issue de la tenue du 5e congrès du parti qui vient d'ailleurs d'être encore reporté. Désigné en avril 2007, le très jeune premier secrétaire a vu son mandant prolongé à deux reprises : en septembre 2007 de la même année puis en septembre 2009. Pour certains observateurs, la mise à l'écart de Karim Tabbou est prévisible : le retour de certains cadres à la direction du parti était déjà un signe avant-coureur de son inévitable disgrâce. Il faut dire que ce jeune loup est contesté par certains cadres du parti qui lui reprochaient ses méthodes “autoritaires”. En 2001 déjà, les “gardiens du temple” ont fait avorter son intronisation à la tête du parti. “Je devais être désigné premier secrétaire national du parti en 2001, mais j'ai dû faire face à une véritable levée de boucliers de la part des anciens”, raconte-t-il en janvier 2009 à Jeune Afrique. “Ils ne pouvaient pas admettre qu'un jeune de 28 ans dirige le FFS. Ce club de cadres qui pensent davantage à leurs intérêts qu'à celui du parti a fait capoter ma nomination”, écrit le site DNA. Il est donc victime d'un conflit de génération ? Hocine Aït Ahmed, lui, a justifié sa décision par les enjeux politiques cruciaux auxquels fera face le pays dans un proche avenir. Pour lui, l'étape actuelle est “un défi majeur, un enjeu vital”. “Nous avons l'obligation de nous organiser en conséquence pour faire face, en conscience de l'extrême modestie de nos moyens mais avec l'ambition de porter notre part de la lutte démocratique et pacifique des Algériens pour un Etat de droit, pour le respect des libertés publiques, pour la solidarité, pour la justice sociale”, explique-t-il dans son message, avant d'ajouter : “Les forces compradores qui ont confisqué l'Indépendance algérienne veulent réaménager la façade d'un pouvoir de violence et de prédation et ainsi lui donner un vernis démocratique. Nous avons le devoir de nous y opposer démocratiquement et pacifiquement (…).” Aux yeux d'Aït Ahmed, “l'heure des plus durs efforts” a sonné et la nouvelle étape nécessite “courage et constance dans l'action” mais aussi renouvellement de “méthodes avec intelligence et imagination politique”. Traçant la nouvelle feuille de route du parti, Aït Ahmed s'exclame : “Des mesures immédiates doivent être prises pour permettre de développer notre action politique et aborder les échéances à venir dans de bonnes conditions !” Après quoi, il annoncera le report du 5e congrès du parti et la tenue d'une convention nationale qui “permettra le débat le plus large et le plus libre autour des échéances électorales à venir. Et le consensus le plus fort pour la prise de décision”. Question : le dégommage de Karim Tabou n'a-t-il pas un lien avec les prochaines élections ? A. C.