Inattendue, cette action de protestation viserait à récupérer le mouvement des lycées et imposer l'UGTA à la table des négociations. Toute cette semaine, des prémices ont annoncé la grève décidée jeudi soir par les cadres de la Fédération nationale des travailleurs de l'éducation (FNTE). Connus pour être plus offensifs que leur tutelle, les syndicats d'entreprises (Sete) de Béjaïa et de Tizi-Ouzou ont été à l'avant-garde de cette surprenante montée au créneau de la FNTE en appelant à un débrayage des travailleurs de l'éducation des deux wilayas la semaine écoulée. “Nous ne pouvions pas les laisser seuls et rester les bras croisés alors que le mécontentement gagne d'autres wilayas”, explique M. Boudaha, secrétaire national chargé de l'organique. Revenant sur le mot d'ordre de grève nationale dans tous les paliers de l'enseignement, qui a sanctionné la réunion extraordinaire des présidents des conseils de wilaya à Tipasa, notre interlocuteur annonce qu'un débrayage graduel de quatre jours sera initié à partir du mardi 16 novembre. Dans le cas où aucune suite n'est enregistrée, une action similaire aura lieu entre le 1er et le 4 décembre. Une semaine plus tard, soit le 10 du même mois, une nouvelle rencontre des secrétaires des 48 wilayas sera organisée pour apprécier les résultats de la grève et débattre des suites à lui donner. “La grève sera poursuivie jusqu'à l'aboutissement des revendications socioprofessionnelles des travailleurs”, indique M. Boudaha. Selon lui, les résultats “décevants” de la dernière tripartite sont à l'origine du durcissement de la position de la FNTE. “Contrairement aux travailleurs des corps communs, les agents d'entretien, notamment les enseignants n'ont rien obtenu”, explique-t-il. À la question de savoir si toute agitation n'est pas en rapport avec le mouvement des lycées initié par deux syndicats autonomes, à savoir le Conseil des lycées d'Alger (Cla) et le Conseil national des professeurs de l'enseignement secondaire et technique(Cnapest), en vue de sa récupération, le cadre FNTE dément toute intention de l'UGTA de contenir la contestation et de s'imposer ensuite à la table des négociations à la place des concernés. Cette arrière-pensée est pourtant d'autant plus vérifiable que le gouvernement s'entête à refuser le dialogue avec le Cla et le Cnapest au motif qu'ils ne sont pas agréés. Le ministre de l'éducation nationale, Boubekeur Benbouzid, a renouvelé, mercredi dernier, devant les parlementaires sa disposition à accueillir les représentants des enseignants, mais à condition qu'ils fassent partie d'organisations légales. Aujourd'hui, en prenant le train de la contestation en marche, la FNTE se présente comme l'interlocuteur idéal. Aussi, il n'est pas surprenant qu'à la veille de la grève qu'elle prévoit ou même après, la fédération soit appelée à négocier avec les pouvoirs publics. Il n'est pas surprenant également qu'elle obtienne quelques résultats qui puissent calmer le front social. Dans ce cas, un seul acquis, à savoir la revalorisation des salaires, pourrait mettre fin au mouvement des lycées. Or, à ce chapitre, le gouvernement reste intransigeant. Hormis les subsides ayant trait à l'augmentation des différentes primes, le salaire de base reste inchangé en attendant l'adoption très aléatoire de la nouvelle loi sur la Fonction publique. Il est fort à parier alors que les enseignants du secondaire, qui entament aujourd'hui leur septième semaine de grève, ne décoléreront pas. D'emblée, le Cla et le Cnapest contestent toute médiation de l'UGTA dans le conflit endémique qui les oppose aux pouvoirs publics et se démarquent des résultats qu'elle pourrait obtenir. Ce refus a poussé son secrétaire général, Abdelmadjid Sidi Saïd, à faire marche arrière en prétendant qu'il n'a jamais été médiateur. “Je défends uniquement mes troupes”, nous a-t-il affirmé, mercredi, à l'issue de son entrevue avec le Chef du gouvernement. Au cours de cette rencontre, Ahmed Ouyahia s'est montré très rassurant. En effet, contrairement au discours très sec qu'il avait tenu lors de sa conférence de presse le mois écoulé, le premier ministre aurait qualifié les revendications des enseignants de légitimes et s'est engagé à les prendre en charge. S. L.